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L’hospitalisation de mon fils, ou ma petite fin du monde
Crédit: Jarmoluk/Pixabay

J’ai accouché il y a 11 heures. Je ferme les yeux, à demi, espérant dormir tout en écoutant sa respiration. Il est si petit dans son berceau. Son bonnet, retombant à moitié sur ses yeux, le rend encore plus petit. Les infirmières passent à tour de rôle pour prendre ses signes vitaux.

Je sens une main sur mon bras.
« Madame St-Gelais, j’apporte bébé Arnaud à la pouponnière. Nous devons vérifier quelques petites choses. Dormez, je vous tiens au courant. »
Je ne comprends pas tout ce qu’elle me dit, mais je comprends que je n’aime pas ça. J’oscille entre deux phases de sommeil. Je demande à la suivre, mais je ne peux pas. Je tente de me rendormir, malgré mon inquiétude, pour reprendre des forces. Si j’avais su, à ce moment, à quel point j’en aurais besoin.

Mon amoureux se réveille deux heures plus tard. Je le sens paniqué dès qu’il ouvre les yeux et qu’il remarque l’étendue du berceau vide. Je lui explique qu’on est venu le chercher, tôt ce matin, pour quelques tests. Il s’habille avec empressement. Il se rend à la pouponnière pour prendre de ses nouvelles et le ramener, au chaud, dans nos bras.

Il revient à la chambre. Son souffle qui coupe ne lui permet pas de me décrire son état. Je le bombarde de questions. Plus j’en pose, plus il pleure. Son silence me laisse croire au pire. Il reprend ses esprits et bafouille quelques explications.

Je chausse mes pantoufles. Je ne prends pas la peine d’enfiler un soutien-gorge. Je marche jusqu’à la pouponnière. Une infirmière m’accueille et demande à voir mon bracelet. Elle vérifie les informations et me dirige vers l’incubateur de mon fils.

Je fonds instantanément en larme :
en couche, électrodes collées à son torse, soluté sur sa main frêle qui boursoufle à vue d’œil, oxymètre accroché à son petit orteil. Je ne vois que tous ses fils. Leur nombre semble me révéler la gravité de son état. Je suis inconsolable.

L’infirmière tente de me rassurer : « Ça va aller. Il respire vite. C’est une petite infection. Pour vous ça a l’air grave, mais nous en soignons tous les jours. » Je pose toutes les questions qui me viennent à l’esprit. Je la bombarde tellement que le médecin vient lui prêter main-forte. Elles ne sont pas en mesure de dire ce qu’il a exactement, mais il a une infection. L’antibiotique, donné via son soluté, la traite déjà. Plusieurs tests seront passés : hémoculture, radiographies et prises de sang. Sans pouvoir trouver ce qu’il a, nous éliminerons, une à une, chaque maladie possible.

Je retourne à la chambre trouver mon amoureux et chercher le courage de revenir forte, près de lui, le bercer en le rassurant que tout ira bien. J’y serai jour et nuit, s’il le faut.

Nous avons passé cinq jours à la pouponnière, dont les trois derniers où nous avons dû le laisser dormir seul parce que j’avais obtenu mon congé de l’hôpital. Inutile de dire à quel point j’ai pleuré.  Il s’agissait d’une infection bénigne. Nous avons eu plus de peur que de mal, mais je jure que cette peur, je ne la souhaite à personne. Comme nous avons pensé à tous ces parents qui vivent ainsi, tous les jours, pendant des semaines, des mois, voire des années. Chaque matin l’envie pressante de se rendre à son chevet, vivre d’espoir toute la journée en souhaitant le ramener le soir, chez lui, dans le confort des draps soigneusement pliés pour lui.

Je souhaite le plus grand des courages aux parents qui vivent un semblant de cette histoire et je leur envoie, sincèrement, tout mon amour. 

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