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La « mom rage » dont on ne m’avait jamais parlé
Crédit: Pexels

Je suis une personne quand même colérique. Il m’est souvent arrivé de lever le ton plus que nécessaire et même, d’arracher ou d’écraser des objets dans des moments d’emportement. Les causes qui me tiennent à cœur peuvent aussi me faire déborder. Mon tempérament est vif et, même si je suis le plus souvent de bonne humeur et easy going, j’ai toujours eu un côté explosif qui ressort de temps en temps (le plus souvent avec mon chum, le chanceux!).

Ceci dit, je ne m’attendais jamais à expérimenter autant de colère en devenant maman. J’ai eu vraiment honte de découvrir toute la hargne qui m’habitait parfois, lors de réveils nocturnes de bébé ou pendant certains moments plus difficiles. Une rage démesurée. Envahissante. Même si elle n’était pas contre mon bébé, elle me perturbait et me troublait. J’écrivais mentalement des lettres de haine à mon chum en pleine nuit, lorsque j’étais avec bébé. Certains jours, je lui hurlais dessus s’il n’était pas parfait dans sa réaction à mon égard ou à avec notre fille. J’explosais régulièrement. In-con-trô-la-ble-ment.

Chaque fois, lorsque j’étais calmée, j’avais terriblement honte, je m’excusais et je me promettais de ne pas recommencer toute cette violence. Peine perdue. Ça ne prenait parfois que quelques heures avant que j’explose à nouveau. Et le concept selon lequel « des excuses sans changement de comportement, ça ne vaut rien » me hantait. Qu’est-ce qui m’arrive? C’est quoi encore, cette nouvelle patente inconnue du monde de la maternité? Qui est cette nouvelle humaine agressive?

Jusqu’au jour où, sur une des nombreuses pages Instagram anglophones relatives à la maternité auxquelles je suis abonnée, j’ai découvert le concept de mom rage. Depuis, j’ai fait quelques recherches pour voir ce que le monde francophone en disait, mais je n’ai rien trouvé. Pourtant, la même recherche avec ces mots anglais dévoile une tonne d’articles, podcasts, vidéos et textes incroyablement soulageants.

Ça existe. Mon état portait un nom. Je n’étais pas simplement devenue une personne infâme… et je ne comprends toujours pas pourquoi je n’ai jamais entendu parler de ça avant.

La maternité est une boîte de Pandore stupéfiante, un mélange étrange de « il faut le vivre pour le comprendre » et « il ne faut pas faire peur aux potentielles futures mamans en donnant trop de détails », ce qui entraîne un peu trop de surprises à mon goût, alors que je pensais naïvement être quand même bien préparée. Oui, chaque expérience avec un nouveau bébé est différente, chaque maman l’est aussi, mais n’en reste pas moins que beaucoup (trop) de sujets sont tout simplement tabous. Que ce soit par honte ou pour faire comme si c’était facile — #êtrepositive — on ne parle pas assez des aspects les plus éprouvants de l’expérience. Les aspects comme la mom rage, notamment.

La colère est une émotion humaine bien normale, que nous expérimentons tous et qui n’est pas toujours facile à gérer, trop souvent vue comme « mal » ou « méchante ». J’ai 33 ans et je me sens encore coupable d’être en colère et je tente souvent de la réprimer au lieu de l’adresser convenablement! La rage, par contre, c’est la colère qui a perdu les pédales et est hors de contrôle. Elle dépasse les limites de l’expression saine d’une émotion.

Je commence tout juste à identifier ce qui est un trigger pour moi, un déclencheur d’irritation qui peut rapidement dégénérer en colère et, si ignoré trop longtemps, en rage. Ainsi, je suis souvent irritée de me sentir seule, sans contrôle sur mon existence et surtout, dépassée. Si, pendant ces moments d’inconfort, j’entends par exemple mon conjoint rire avec un collègue au téléphone — il est en télétravail depuis la fin de son congé de paternité — ça peut suffire à me mettre en colère: « Ah lui, il l’a facile hein? Il rigole toute la journée avec les collègues, en me laissant toute la job sale! »

Si, lorsque ma colère est attisée, il finit de travailler un peu plus tard ce soir-là, la rage peut commencer à gronder: « Il me manque tellement de respect, on ne compte pas pour lui, il ne pense qu’à lui, je fais tout ici. » Et lorsqu’il finira sa journée, c’est à une bombe sur le bord d’exploser qu’il demandera innocemment s’il reste des trucs à préparer pour le souper. Oh-oh. Boum. C’est parti. L’accumulation d’un million de petites choses, vraies et imaginées, s’abat sur lui. Et assurément pas de la façon non-violente et en parlant au « je » comme il est recommandé de procéder dans les cours de communication.

Pour d’autres, la mom rage commence un peu plus tard, en réaction à certains comportements de leur(s) enfant(s). De mon côté, j’en suis encore seulement à de l’irritation et parfois de la colère, surtout contre la réalité et pas tant encore contre mon p’tit chat de 10 mois. Sachant ce qui s’en vient dans son développement, je travaille fort à mieux me contrôler en amont, afin d’apprendre à évacuer avant d’exploser. Les mots que l’on prononce, impossible de les rattraper.

Crédit : Instagram/_happyasamother

Quelques pistes pour éviter les explosions :

  • Seule:
    • Identifier ce qui déclenche notre irritation, notre colère
    • Oser exprimer les émotions ressenties, par écrit ou à voix haute
    • Prendre du temps pour soi, d’une façon qui nous fait du bien
    • Quitter les lieux, lorsque c’est sécuritaire de le faire
    • Trouver du soutien (par exemple, les groupes de mamans sur Facebook offrent souvent beaucoup d’écoute et d’empathie)
    • Pratiquer la méditation ou des techniques de relaxation
  • Avec les autres:
    • Verbaliser les émotions ressenties sans laisser les évènements s’accumuler (facile à dire!)
    • Demander de l’aide — j’ai envie d’écrire EXIGER de l’aide, particulièrement de l’autre parent, s’il y a lieu
    • Communiquer nos besoins avec précision
    • Mettre par écrit la répartition des tâches de chacun et la respecter

J’ai beaucoup de travail à faire pour apprendre à communiquer mes émotions, mes attentes et mes besoins, mais déjà, de savoir que je ne suis pas brisée est un immense réconfort. 

La maternité est un ensemble de changements vraiment perturbants et c’est toujours rassurant de savoir que d’autres sont passées par là, ont survécu et ont même décidé de recommencer (ça, c’est la partie qui me dépasse). Si je peux faire une petite différence dans le monde, avec la portée que j’ai ici, ce sera pour rendre encore plus transparent ce passage: j’aurais aimé savoir un paquet de trucs avant d’être maman.

Je sais que c’est un apprentissage en continu pour toujours, que ça peut faire peur de trop en savoir à l’avance, mais je suis convaincue qu’on gagnerait vraiment à être davantage honnêtes dans notre parcours, parce que la vulnérabilité est effrayante, oui, mais oh combien rassembleuse.

Si ce texte vous interpelle, je vous en prie, faites quelques lectures à ce sujet, ça fait un bien fou!

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