[Vous pouvez lire la première partie de ce texte ici.]
J’avais si hâte de rentrer chez moi. J’avais besoin de réconfort. Le voyage avait été long et pénible. Aux douanes canadiennes, ils ont décidé de me fouiller. Ils m’ont fait attendre puis ils ont vidé mon sac à dos, cherchant je-ne-sais-quoi dans mon linge sale. Ils ont ensuite tout laissé là en me disant que tout est beau, de ramasser mes affaires et de partir. Une histoire banale de 45 minutes. Un 45 minutes de trop. J’étais épuisée. J’étais bouleversée. Je voulais juste passer les portes, voir mes parents et mon chum.
Le lendemain de mon retour de voyage, je me suis rendue dans une clinique, chose que je n’avais pas faite en Australie. C’est là que j’ai appris que j’étais à 15 semaines et demie de grossesse et que je devais prendre une décision rapidement.
De retour dans ma réalité, la décision s’est prise naturellement, je n’étais pas prête à avoir un enfant. Quelques jours plus tard, je me rendais à la clinique d’avortement. Je devais la laisser partir. Je m’apprêtais à vivre la pire journée de ma vie. J’en ai gardé quelques souvenirs bien précis. La salle d’attente. Plein de filles qui m’ont semblé vivre une journée comme les autres. Qui ne se connaissaient pas, qui se jasaient, qui riaient.
Il me semble que j’étais la seule muette, et la seule qui ne pouvait retenir ses larmes. Puis, on est venu me chercher pour le curetage. On m’a dit que ce serait rapide et sans douleur. Ce fut tout le contraire. J’y ai passé une bonne heure, dans la souffrance.
Je ne sais plus trop si on m’avait donné un calmant, mais je me souviens que je fixais le plafond et qu’il y avait des dessins de fond marin; drôle de hasard pour une fille qui revenait d’un trip de plongée en Australie. Ce petit détail m’avait fait du bien. Dans la salle de réveil, on est venu me voir. Depuis mon arrivée au matin, je ne faisais que pleurer.
On m’a dit que le médecin n’était pas certain que « tout » avait été enlevé et que je devais passer une échographie. C’est ce que je fis. L’échographie nous révéla que le petit bébé, ma petite Koalie, était encore là, bien accrochée. On m’a proposé deux options, soit de refaire un curetage immédiatement ou de me faire opérer, plus tard la même journée.
J’ai opté pour la 2e option. L’après-midi a passé, puis la soirée. J’ai le souvenir d’avoir pleuré sans arrêt pendant tout ce temps. Vers 23h, on est venu me chercher. Je ne sais pas trop quel médicament on m’a donné, mais je me souviens que j’ai parlé sans arrêt pendant toute l’opération. Je n’ai rien senti, à part un grand vide, quand tout cela a été terminé. On m’a donné mon congé le lendemain, à 8h.
Mon bébé était parti, mais ma tristesse elle, m’a suivie longtemps. Pendant environ 1 an, chaque fois que je voyais une femme enceinte ou un bébé, je pleurais. J’étais incapable de me sortir Koalie de la tête. Et je gardais tout ça pour moi. J’étais dans une période où, pour différentes raisons, j’avais peu d’amies à qui me confier. J’ai fini par en parler à ma soeur, puis à mes parents.
J’ai probablement trop attendu. Mon père, pas tellement le genre d’homme à démontrer ses émotions, m’avait dit en pleurant une phrase dont je me souviendrai toujours: « Si tu as un problème et que tu as besoin de moi, j’irais te chercher jusqu’en Australie. ».