Ça y est je vais être maman.
Juste le dire ça me fait encore bizarre. Et je suis rendue à 7 mois de grossesse.
D’aussi loin que je me souvienne j’ai toujours voulu être maman. Chez nous, on est 4 enfants; ma mère a eu ma soeur à 23 ans. Bon, c’est une autre époque vous me direz, mais quand même ça doit couler quelque part dans mon sang.
J’ai eu la chance d’avoir une carrière de comédienne qui a commencé très tôt dans ma vie; à 9 ans je travaillais déjà sur des plateaux de tournage, je gagnais des sous, j’avais un peu une vie d’adulte avec les responsabilités et les horaires intenses qui vont avec. Ce qui fait en sorte que j’ai grandi rapidement.
J’ai eu une vie hyper excitante, à 100 miles à l’heure, différente du parcours normal d’une enfant ou d’une adolescente. Une vie remplie d’aventures, de défis, d’accomplissements professionnels et d’abondance. J’ai beaucoup voyagé, j’ai été indépendante financièrement jeune, je me suis acheté une première maison à 18 ans alors que je jouais dans Ramdam. Je travaillais fort et j’en profitais. Des cours de danse, de chant, de jeu, aller voir des shows, sortir avec les amis. « Work hard play hard », comme ils disent. Soirées de premières, tapis rouges, etc.
Je ne m’ennuyais jamais, je manquais toujours de temps et je m’étourdissais un peu dans la fête au passage, parce que pourquoi pas, après tout on est jeunes il faut en profiter.
Ma vingtaine est passée en coup de vent et pourtant, quelque chose me manquait.
J’avais dans le fond de mon coeur une sorte de mélancolie. Un vide, un trou inexplicable qui me bloquait et m’empêchait d’avancer et d’être totalement heureuse par moment. Le temps a passé, la trentaine s’est pointée, j’ai acheté et vendu au moins 5 maisons, acheté un condo sur le Plateau que je louais…
Puis est venue la grosse maison de banlieue à St-Bruno: 3 étages, 5 chambres, les plates-bandes, les fleurs, le jardin que je partageais avec fierté sur Instagram, la tondeuse, le cinéma maison dans le sous-sol, le cardio plein air dans le mont St-Bruno le samedi matin avec des femmes de moyenne d’âge de 50 ans.
Ça y est, j’étais devenue ma mère sans m’en rendre trop compte. Et j’ai un peu paniqué je l’avoue.
J’avais 33 ans, un énorme bagage d’expériences et de souvenirs, de l’abondance matérielle, mais pourtant je me sentais pas complète, pas à ma place. Je n’avais pas de but concret; pas de famille. Toutes mes amies avaient des enfants, 1, 2 ou 3, j’étais matante 2 fois et marraine 2 fois ( prix de consolation pour les amies sans enfant) et chaque fois qu’une nouvelle amie m’annonçait une grossesse, j’avais des larmes aux yeux qui me tordaient le coeur, heureuse pour elle, malheureuse pour moi.
Pourquoi pas moi? J’avais tout le set-up pour avoir des enfants. Pourquoi il ne voulait pas. Il allait changer d’idée…sans doute un jour…peut-être…j’espère…s.v.p. mon Dieu?? (tsé quand on se met à prier, c’est que ça commence être grave, en tout cas pour moi).
J’en ai passé des nuits à brailler. Et malgré tout l’amour qui existait dans ma relation à l’époque, après 10 ans de vie commune et de folle complicité…ben ça a chié ( il n’y a pas d’autres mots) littéralement. Parce que lorsque 2 personnes ne regardent pas dans la même direction, c’est juste impossible de continuer d’avancer ensemble. C’était trop important pour moi. C’était viscéral.
À 33 ans j’ai dû tout recommencer.
Plus de chum, plus de maison, plus de travail. Tout a basculé d’un coup. J’ai perdu du jour au lendemain tous mes repères, tout ce que je prenais pour sécurité depuis 10 ans a disparu. J’ai vécu un énorme vide, l’impression d’avoir vécu le plus grand des voyages et le plus grand des naufrages. J’étais à sec, perdue, étourdie. Je ne savais plus trop qui j’étais. Je ne me définissais plus par rien.
Je me souviens ce matin de tempête hivernale où j’ai conduit le gros camion cube toute seule de St-Bruno à Montréal pour déménager dans mon minuscule condo dans Rosemont. Ouf! Je prenais une méchante débarque. Ça a fait mal, mais je sentais que c’était la bonne chose à faire.
Quelques mois après ma séparation je suis partie en voyage au Costa Rica, toute seule.
J’avais dans ma tête et dans mon coeur cette force de la guerrière qui n’a plus rien à perdre. J’avais juste envie de m’amuser et de m’ouvrir au monde (quétaine, mais c’est ça). Et surtout de mettre de côté Mirianne Brûlé l’actrice, la blonde de l’autre, la fille de la télé, la fille de Ramdam, celle qui vient de se séparer…
J’avais besoin d’une pause.
Une pause de l’hiver, de Montréal, du regard triste des gens qui me connaissent, de ma mère qui s’en fait trop pour moi, de mes amies qui continuent leur vie de famille parfaite. J’étais encore triste, mais je me sentais plus forte, car le deuil avait commencé bien avant la rupture….
Et un soir, sans que je m’en attende un bel Argentin s’est pointé sur mon chemin.
Ça a été électrique, un vrai coup de foudre, impossible à expliquer, je n’avais jamais vécu ça avant. Une attirance immédiate, une fluidité, un naturel, pas de game, juste du vrai, du raw. Ce qui a été une aventure de voyage est vite devenu une relation sérieuse.
J’habitais désormais la moitié de mon temps au Costa Rica. Je suis devenue Mimi, la Québécoise du Canada. Ici personne ne me connaissait. Je pouvais être moi, juste moi. Une vie de rêve avec couchers de soleil, apéros sans fin et baignade quotidienne dans la mer. Une nouvelle culture, une vie beaucoup plus simple. Presque pas de matériel, entourée de nature et de moments présents partagés avec plein d’expats de partout dans le monde. Pas de plans précis, pas d’horaire.
J’étais heureuse, amoureuse, je me sentais à ma place sans trop savoir où ça allait me mener, je me sentais légère et libérée d’un énorme poids.
Et 10 mois plus tard, je suis tombée enceinte.
Comme ça. Du premier coup. Sans compter les jours de mon cycle, sans prendre la température de mon ovulation, sans calculer rien ( j’avais pourtant tellement lu sur le sujet du temps où je rêvais de tomber enceinte par magie). On en parlait depuis le début de notre relation; il a 37 ans, il était rendu là. Il voulait la même chose que moi. On a laissé aller les choses et c’est arrivé. Aussi simple que ça.
Aussi simple que notre rencontre. J’en revenais tout simplement pas. Mon corps m’a offert ce cadeau, on est un bon match génétique faut croire. Après avoir lutté pour et contre ce désir d’être maman depuis plus de 5 ans.
Voilà que je me retrouve enceinte à 34 ans au Costa Rica. Un papa Argentin expatrié à Tamarindo au
Costa Rica, une maman québécoise, un petit bébé conçu au Costa Rica qui va naître au Québec, et qui sera élevé moitié Costa Rica, moitié Québec, qui va parler espagnol, français et anglais.
Tsé mettons, tu m’avais dit que ce serait ça ma vie je ne t’aurais jamais cru.