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La fée des dents: quand faut-il briser l’illusion?
Crédit: Pexels

C’est un soir, y a environ deux semaines. Le ciel était beau et l’air doux, miraculeusement. On revenait de l’école, sous nos pieds la glace craquait et Ange papotait joyeusement, comme à son habitude lors de ses bonnes journées. Elle jouait distraitement avec une de ses dents qui branle puis soudainement, fronça les sourcils.

Ange: À l’école, y a plein de gens qui se moquent de moi.
Moi: Bin là! Pourquoi?
A: Y disent que j’suis nounoune de croire encore à la fée des dents.

(silence où mon cerveau a surchauffé dans sa tentative de trouver une réponse adéquate)
M: Bin voyons donc…

J’ai vu le doute passer sur son visage comme une petite ombre et elle a levé le sourcil bien haut, en une parfaite réplique du mien lorsque ses réponses sont louches et que je sais qu’elle ment. J’étais dans la merde. 
Ange: Elle existe, hein maman? Sinon c’est qui qui m’a donné tous les sous?

Là, j’ai paniqué. Je ne savais plus du tout quoi dire. On répond quoi à un enfant qui demande si on lui ment depuis des années sur l’existence d’une quelconque créature magique?

«T’es pas nounoune, mais elle existe pas la fée des dents… pis pendant qu’on y est, le Père Noël et le lapin de Pâques non plus, désolée. » 

Je n’ai pas dit ça. Je voyais déjà son sourire s’obscurcir et du haut de ses sept ans, elle m’en voudrait à mort de briser ses illusions, mais c’était peut-être le temps de lui dire la vérité? J’ai pris une grande respiration pour répondre à sa question quand elle m’a interrompue en vociférant dans son foulard :

« Mais je les ai pas écoutés maman, j’ai fait comme tu me dis, j’ai dit que MOI j’y crois pis que c’est ça l’important, pis que ça me dérangeait pas qu’ils me traitent de nounoune. Moi, j’suis certaine que la fée des dents va me donner encore des sous quand ma dent va tomber. Pfff! »

Elle était si mignonne et si brave avec ses petits yeux plissés par l’indignation! J’ai craqué, j’ai été lâche; je lui ai dit qu’elle avait bien fait de ne pas les écouter, que j’étais fière d’elle et de son courage, puis j’ai changé de sujet. Je ne sais pas comment dire à ma fille que comme beaucoup d’autres parents, j’ai eu envie de rendre son existence magique pour quelques années, même s’il fallait pour ça lui mentir. 

Y faisait trop beau, elle était trop adorable, j’étais pas assez courageuse ce soir-là et la fée des dents donnera des sous la prochaine fois, en attendant la dernière.

À quel âge avez-vous annoncé à vos enfants que tout ce beau monde-là n’existait pas?

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