Ça n’a jamais été une surprise pour tous ceux qui me connaissent : je n’aime pas le rose. Je n’aime pas le porter ni en déco. Je trouve seulement que ce n’est pas une belle couleur. Je ne suis ni fi-fille ni princesse. Chez nous, la couleur de choix, c’est le noir.
Enceinte d’un enfant de sexe inconnu, forcément les cadeaux ne tournaient pas autour d’un genre en particulier. Même que plusieurs se sont «forcés» pour trouver des fringues neutres pour nous faire plaisir. Depuis leur naissance, nos filles portent du noir, du gris, du bleu, du vert. Des pantalons, des shorts, des t-shirts. Mais jamais de rose, de robes, de paillettes. Pas de mauve, de froufrous ni de jupes.
Crédit photo : Valerie Fraser.
Un choix conscient pour ne pas donner l’impression qu’elle doit être une jolie princesse pour être «belle» dans la vie. Aussi une question de cadeaux, de dons et de vouloir garder la garde-robe aussi unisexe que possible dans l’éventualité d’un #2.
Pourtant, il y avait une partie de moi qui s’y attendait dès que #1 est arrivée et que j’ai constaté la fente entre ses jambes. Je savais que ses gouts prendraient un jour le dessus sur les miens, mais je ne savais pas quand ni comment. J’avais donc une petite fenêtre où j’allais pouvoir choisir pour elle et qu’après elle deviendrait une petite personne avec une grande personnalité. Elle aurait ses gouts et ses envies.
(Je vous arrête tout de suite : nos filles ne vont pas à la garderie, alors ce n’est pas de là l’influence. On choisit les films qu’elles écoutent et pas de films de princesses pour l’instant, alors ce n’est pas ça non plus. Les livres? Les amis au parc? C’est peut-être ça, mais je serais bien surprise.)
Aussi surprise que le jour où E1 est venue me voir, sourire fendu jusqu’aux oreilles, fière comme un pet en me disant : «Moi, chus princesse.».
«- Ben oui, t’es une princesse. Maman aussi et E2 aussi.
– Moi chus princesse avec robe, dit-elle vêtue «comme un garçon» .
– Tu sais, t’as pas besoin de robe pour être une princesse mais si tu veux, on peut aller t’en trouver une.
– Moi veux robe rose de princesse. Moi chus princesse.»
Je suis restée bouche bée.
Dès le lendemain, armée de bonnes intentions, je suis partie en mission avec elle pour trouver la robe de princesse qu’elle voulait tant. La fameuse robe rose.
De manière bien égoïste, j’espérais presque qu’elle change d’idée arrivée à la boutique. Moi, maman d’une petite princesse!? Ça me laissait un drôle de petit gout amer dans la bouche. Je me sentais aussi bien équipée pour ça qu’un papa qui doit acheter des tampons pour la première fois.
Elle a choisi la robe que j’avais aperçue du coin de l’oeil en me disant «SVP, pas celle-là!». De retour à la maison, vêtue de sa robe, elle est restée une bonne heure à se regarder dans le miroir.
Ç’a été une leçon de tolérance pour moi et d’individualité pour elle.
À quel moment avez-vous pilé sur votre orgueil pour céder aux envies de vos enfants?