22 août, 6 h 30.
Maman se lève d’un coup en criant: «Iiih! Mon Dieu mon Dieu!». Eh oui! Elle a crevé ses eaux. Le stress embarque. Papa appelle à la maternité et la dame à l’accent charmant lui répond de coucher maman sur le côté et d’attendre vingt minutes avant d’y aller. Tu ne connais pas encore papa, mais lui demander vingt minutes, c’est comme lui demander de patienter dix heures.
Pendant que maman est couchée, elle donne des consignes à papa «Mets ça dans la trousse, ça dans le sac». Évidemment, il oublie des choses : pas d’oreiller, pas de coussin d’allaitement. Mamie s’en chargera.
22 août, 7 h.
Départ pour la maternité, stressés, confiants, hâtés de te rencontrer. On nous installe dans la chambre printanière, rose pâle et vert pomme. Faut s’habituer, on y sera un moment.
22 août, 7 h 30.
Maman a un seul centimètre de fait (l’infirmière nous dira plus tard qu’elle était gentille en nous disant ça, puisqu’elle n’avait pas tout à fait un centimètre). On garde l’espoir de te rencontrer bientôt. Surtout que la docteure qui s’occupe de maman lui explique qu’elle ferait mieux de déclencher étant donné qu’aucun travail n’est fait, et que ça cause souvent des accouchements plus expéditifs.
Note au lecteur : Papa et docteure n’ont pas la même définition du terme expéditif.
22 août, 8 h.
Changement de shift, changement de staff. Maman a plus de douleur, mais les contractions sont supportables. Le travail n’avance pas (rappelez-vous la note). Elle passe d’assise, à couchée, à debout, au ballon, copiez, répétez.
22 août, 13 h.
Le col s’éclaircit. On est à 1,5 centimètre. HOURRA! À ce rythme, papa trouve que tu t’y prends lentement.
S’en suit une série de minutes qui se ressemblent drôlement. Ballon, assise, couchée, debout…
22 août, 16 h.
Changement de shift, changement de staff. Un beau trois centimètres bien compté. Docteure donne le droit à maman aux calmants. Vive la médecine moderne! Elle nous sort des perles :
«Je me sens comme une petite guimauve!» «Vive la drogue!» «On aurait dû apporter les taies d’oreiller rouges. Ça aurait été beaucoup plus beau sur les photos.» ne sont que 3 phrases parmi tout ce que ta maman a dit.
Papa commence à se sentir inutile. Flatte maman, masse, embrasse… rien n’y fait plus. Maman jure de frencher l’anesthésiste.
22 août, 19 h 15.
L’anesthésiste arrive. 5 centimètres, une péridurale et hop, maman arrive à se reposer.
22 août, 22 h.
6 gros centimètres. Ça avance lentement, mais sûrement.
22 août, 23 h.
9+ centimètres. Dans quelques heures nous aurons le plaisir de te rencontrer mon petit renard.
23 août, minuit.
Complète! Maman passe quelques insatisfactions gastriques puis on se prépare à pousser. Elle est bonne ta mama. Elle pousse fort et on finit par voir ta chevelure («on» exclut définitivement la personne qui parle, papa t’aime beaucoup, a hâte de te voir, mais sorti au complet, pas en processus).
23 août, 2 h 45.
Maman redouble d’ardeur après qu’elle ait bien fait comprendre à papa qu’elle préférait qu’il compte jusqu’à dix plutôt que de lui dire que ça va bien. Tu sors bien entortillé, un tour de cordon autour du cou, un autour du torse et un dernier autour du bras. Trois petits tours qui nous font croire que tu auras besoin d’aide, mais non. Tu es un battant. La docteure et ses skills de médecin rassurent papa. Tu ne pleures pas fort comme dans les films. Tu chantes. Doucement. Et sans même que papa s’en rende compte, il coupe le cordon, lui qui s’était juré de ne jamais couper quoi que ce soit.
Sept petites heures de vie…
Crédit photo : Jean Philippe Morin.
Sur la bedaine de maman, à pleurer doucement, Victor Morin, c’est le début d’une grande histoire. Une belle expédition, celle de ta vie, mon coeur. Bonne route, bonne aventure mon renard. Un matin humide et chaud d’août commence la plus belle des histoires d’amour. Celle d’un papa pour son garçon. La chair de sa chair.
Trois petits tours et puis s’en vont, vers l’infini et plus loin encore!
Avez-vous eu ce genre d’accouchement interminable? Quels ont été vos trucs pour passer au travers?