En 1855, un proverbe français se lisait comme suit : « Qui a bon voisin, a beau matin. »
Je ne pensais jamais que ça allait m’arriver un jour. Être amie avec une voisine. Les précédents locataires étaient des trouble-fêtes sans façon ni manières. Parler de drogues et de délinquance à mes amours qui avaient alors 3 et 5 ans, ce n’était pas ce à quoi je m’attendais d’une relation de voisinage.
Puis il y a eu des rénovations, pendant longtemps. Et sont arrivés les nouveaux voisins. Un papa, une maman enceinte et une petite fille.
Quand ai-je croisé ma voisine pour la première fois? Je ne me rappelle même pas. Cette superbe femme aux grands yeux bleus qui dit d’elle-même « qu’elle est pas mal plus cernée depuis qu’elle a des enfants ».
Elle, préoccupée par son ventre rebondi et la petite fillette qu’elle tenait solidement par la main. Moi, préoccupée par ma propre ribambelle d’enfants chahuteurs.
Pourtant on s’est rapidement comprises sans avoir à se parler. On s’est reconnues par nos chevelures recoiffées à la hâte, par nos cernes allant jusqu’aux genoux, par l’amour infini porté à nos enfants, même si c’était en criant « Là, ça suffit, tu rentres à la maison! ».
Quand on est une personne adulte avec des enfants, bâtir une nouvelle amitié c’est comme avoir l’impression de franchir une porte qui ouvre vers un univers parallèle. Difficile de revenir dans un monde d’adultes quand notre principale source d’interactions humaines prend la forme de nos toddlers.
« As-tu lavé tes mains? »
« Viens ranger tes vêtements! »
« Lâche ton nez! Lâche ta sœur! Lâche le chat! »
C’est en passant par de timides « bonjour » sur le balcon arrière, qu’on a fini par maîtriser l’art de la conversation « par brides », une anecdote pouvant s’étaler sur plusieurs jours. Puis on a partagé nos questionnements, nos angoisses et de ces fous rires interminables sous les yeux étonnés de notre progéniture.
La clôture qui sépare nos terrains n’est plus une délimitation territoriale austère comme elle l’était jadis, elle est maintenant devenue un point de rencontre.
À ce jour, je sais qu’elle n’a pas le pouce vert et qu’elle fait mourir tout ce qui s’appelle plantes en pot. Pourtant, elle s’est occupée avec brio de mon jardin lors de mes vacances cet été.
À ce jour, je ne sais pas quel est son repas favori, mais nous partageons un amour inconditionnel pour le Perrier aux fraises. Froid. Bien froid.
À ce jour, je la texte à chaque matin pour lui souhaiter bonne journée. Ou elle le fait. Et quand on passe à côté parce que le matin est trop chargé, c’est comme s’il manquait quelque chose à nos routines respectives.
À ce jour, on continue à s’épauler mutuellement, sans pour autant entrer dans la bulle de l’autre. Sauf pour se dire qu’on est une bonne mère. Parce qu’on ne se le dira jamais assez.
Belles et bonnes mamans, comment ça se passe vos amitiés d’adultes en 2018?