Thelma, Louise et moi de Martine Delvaux est un livre qui prend le film Thelma et Louise comme point de départ d’une démarche introspective retraçant le parcours de vie de l’autrice depuis ce jour de 1991 où elle éclata en larmes au cinéma, devant la scène finale de ce film culte. « J’ai suivi le scénario du film à la manière de marques topographiques sur le chemin de ma propre vie : deux femmes, une voiture, un voyage, un viol, un révolver » (quatrième de couverture).
Ok, je l’avoue. C’est un clin d’œil facile, de choisir ce titre, « Martine Delvaux et moi », pour parler du livre « Thelma, Louise et moi ». C’est facile et un brin cucul, et pourtant, j’y tiens, à ce clin d’œil : petite mise en abîme qui dévoile mon envie de mimer le geste du livre, de me mettre aux côtés de Delvaux comme elle se met aux côtés de Thelma et Louise, rouler avec elle, qui roule avec elles. Il y a dans ce livre quelque chose comme une tentative de filiation amoureuse, ou de filiation féministe, qui donne envie d’y participer : entrer dans la danse de l’écriture et de la recherche de soi, à travers le voyage que l’on fait pour aller vers l’autre, pour trouver l’autre et se trouver (un peu?) en même temps.
Je me suis amourachée de l’écriture de Martine Delvaux assez récemment, à la lecture de Le monde est à toi, dont j’ai d’ailleurs parlé sur le blogue. Si Delvaux répète souvent dans Thelma, Louise et moi que les livres la font rarement pleurer, je peux dire que pour moi c’est tout le contraire, surtout pour les livres de Delvaux, justement.
Pourquoi j’ai pleuré? D’abord à cause du dévoilement, à cause de cette sensibilité et d’une espèce de mise à nue qui est pourtant discrète, un brin secrète, mais tellement sincère, il me semble. L’écriture de soi nous construit certainement en partie, et même si mon écriture à moi est loin d’être une écriture d’écrivaine, c’est sûrement une des raisons pour lesquelles j’écris : me trouver dans mes mots, explorer en me racontant. Il y a de ça dans Thelma, Louise et moi, une écriture de l’intime qui pose de manière sensible et interrogative la question de ce qui nous construit, ce qui nous fait devenir qui l’on est (des livres, des films, des rencontres, des musiques, des agressions, des dénonciations, des amitiés, de la sororité). Cette mise à nue me semble bien courageuse. Un genre de saut dans le vide, avec l’écriture pour compagne (mais peut-être que je pousse trop la métaphore).
Je me suis retrouvée, dans ce livre, et c’est peut-être ce sentiment rassurant de savoir que l’on n’est pas seule qui m’a tant touchée, bouleversée. Je me suis reconnue dans la forme de sensibilité qui y est exprimée, reconnue dans la quête, l’envie de retrouver quelque chose d’oublié, ou bien d’oublier quelque chose. Un peu comme c’était le cas pour Le Monde est à toi, Thelma, Louise et moi a provoqué chez moi un sentiment de sororité, l’impression de faire partie de quelque chose comme une communauté. Se lire dans les mots d’une autre est un de mes grands bonheurs de lectrice. Ça m’apaise.
J’ai beaucoup aimé aussi les réflexions, présentes tout au long du livre, qui portent sur l’écriture. Comment écrire, pourquoi écrire? Comment l’écriture peut-elle me lier à elles (Thelma et Louise), comment peut-elle montrer la vie, l’amour? Quel chemin tracer vers les autres en écrivant? Si le livre apporte quelque réponse à ces questions, c’est en se faisant démonstration, démarche, expérimentation.
Au final, Thelma, Louise et moi est une histoire d’amour, l’amour d’une femme pour d’autres femmes, réelles ou fictives (ou un peu des deux), fantasmées ou rencontrées, de passage, courageuses, blessées, féroces, amoureuses, vivantes, restless.
Si vous avez envie de goûter cet amour, je vous le recommande vivement.