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Se dire les vraies affaires : l’accouchement sans filtre et sans lunettes roses (partie 2 de 4).
Crédit: Valérie Turcotte, Accompagnante à la naissance

(Âmes sensibles, s’abstenir)

Dans tes fluides corporels, tu baigneras, ceci aurait pu être le titre de ce second volet, car un accouchement, c’est physique.

Extrêmement physique. Un marathon, s’accorde-t-on à dire, la douleur en plus. S’il dure moins de dix heures pour un premier bébé, on va vous conseiller de vous ruer à l’hôpital pour votre second. Lors d’une naissance, je m’absente rarement moins de 20 h de chez moi, et j’ai déjà passé plusieurs fois plus de 35 h au chevet d’une parturiente. Par chance, la maman perd en général la notion du temps. Le papa, c’est plus rare. Ça prend donc de la préparation (encore), de l’endurance, et beaucoup de patience. 
 
En plus d’être physique, un accouchement, ce n’est pas propre. Vous-même trouveriez ça dégueu si vous n’étiez pas complètement buzzée et désinhibée par vos hormones déchaînées (pour une fois qu’elles sont de notre bord!). Heureusement, les personnes autour de vous lors de ce grand jour sont soit éprises de vous et de votre engeance au point de faire complètement fi de cet aspect peu ragoûtant, soit rompues à l’exercice auquel elles se sont professionnellement dévouées.
 
Enceinte, on est avide de connaître les signes précurseurs du travail. Eh bien, je vais vous surprendre peut-être, mais tout commence en général par une légère diarrhée. Le gros gush de flotte (sorry pour le visuel) comme dans les films arrive dans moins de 10 % des cas. Fiou. Par contre, dans 100 % des accouchements, la prostaglandine joue bien son rôle; celui de vous vider les intestins pour faire de la place au petit qui va s’y accoter. La nature est bien faite et limitera ainsi la fuite de caca qui vous fait si peur au moment de pousser (en fait, avant, car rendue là, vous allez vous en foutre royalement).

La perte du bouchon muqueux est un autre joyeux signal qui se produit sur la toilette. Ô beauté de la glaire sanguinolente, dont il m’est arrivé de recevoir la photo par texto. #accompagnantelife
 
Les nausées (que certaines pensaient loin derrière) déboulent rapidement dans le travail, parfois allant jusqu’aux vomissements. Hormis un sac de noix et de la compote de pommes, que vous tolérerez peut-être, destinez les collations dans votre valise d’hôpital au papa. En fin de dilatation, les sages-femmes accueillent avec le sourire ces spasmes du diaphragme, qui annoncent l’imminence de la poussée. Mais ça n’est en pas moins très désagréable pour la maman (et pour le papa qui en est aspergé ou qui vide le haricot. Oui, les infirmières ne sont pas très disponibles).
 
Quels que soient la saison et le degré de climatisation de votre chambre (souvent trop élevé, avis au papa, petite veste de rigueur!), vous allez suer et arracher votre jaquette à chaque contraction, grelotter et trembler comme une feuille entre. J’espère qu’une main compatissante appliquera sur votre front ruisselant la bienfaisante compresse froide dont vous rêvez.
 
Ce qu’on omet parfois de dire aux futurs parents, c’est que des filets de sang dégoulinant le long des cuisses de la maman accompagnent souvent la dilatation du col. Il se peut fort bien qu’ils se mêlent à des coulées de liquide amniotique si les membranes sont fissurées ou rompues. Il va vous falloir changer régulièrement le piqué sous vos fesses. Et pour votre confort, vous êtes mieux de le demander à votre chum plutôt que d’attendre la venue de l’infirmière, qui ne peut pas toujours accourir au moment où les fluides décident de se laisser aller. Truc de pro: les piqués se trouvent dans une des armoires de votre chambre, cherchez-les.
 
Parlant de sang, les papas m’avouent souvent avoir peur du sang. Qu’ils se rassurent! Ils sont en général captivés par leur premier tête-à-tête avec bébé lorsque le vrai déluge* se produit. Messieurs, restez donc collés auprès de vos deux amours plutôt que de jeter un œil à la sortie du placenta et aux éventuelles sutures.
 
Quant aux bains de lait maternel que vous prendrez 24 à 72 h après tout ça, c’est une autre histoire.
 
Bref, vous allez imbiber de vos sécrétions pas mal de tissu. À mes yeux, cette plongée imposée dans la corporéité de la naissance s’intègre absolument à la transformation de grande ampleur qu’elle vous fait vivre. Et si la vie était jusqu’alors parsemée d’occasions de honte, de gêne et d’attentat à la pudeur, vous voilà bien déniaisés. L’allaitement en tous lieux et les changements de couche n’en seront que facilités.

 


* Sauf hémorragie, on perd rarement plus que 500 ml-1l de sang.
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