Je suis allée sur Mars, paraît. C’est ce que j’ai lu quelque part au sujet de ce qui m’est arrivé.
Comment j’ai pu, moi, la fille timide, gênée, pudique, craintive, traumatisée… atteindre un niveau de transe aussi profonde en accouchant?
On dit que l’enfantement est une chose qui s’oublie. Pour ma part, je n’ai jamais perdu ce souvenir-là. Il n’y a pas une semaine où une image précise de cette épreuve ne me traverse la tête. Mettre au monde un bébé m’a mise au monde.
Ce qui est arrivé.
Dès qu’on m’a injecté du pitocin, pour déclencher le travail, je n’ai rien ressenti l’élancement était tolérable. Je surfais sur des vagues. C’était bien. « L’épidurale? Non, merci. »
En trois heures, j’étais dilatée à 10 cm et prête à expulser. « Emmenez-en des accouchements! » que je me disais. Puis la douleur est arrivée. IMMENSE. Le feu. Un incendie me ravageait l’intérieur. J’en étais à ma quatrième heure avec une tête de bébé coincée entre mes jambes.
Ce qui s’est produit.
J’ai senti que c’en était fini et que mes efforts étaient vains. J’allais mourir comme ça, un bébé entre les jambes. Les infirmières, le médecin résident, le gynécologue, mon amoureux; tout le monde a disparu.
Je n’entendais plus rien. Je me sentais flotter ailleurs. Ma voix s’est mise à grogner. J’étais animale, ourse, grizzly. J’étais dans les vapes. J’ai senti une force inouïe, dans mon corps. J’ai propulsé hors de moi tout ce que j’avais. J’ai accouché.
Il est vrai que le travail ne s’est pas fait tout seul. Le médecin y est allé à coups de ventouse. Mais j’ai survécu. J’ai passé au travers de ma gêne. J’ai même atteint un niveau de transe!
Ce que j’en fais, maintenant.
Depuis, quand il m’arrive de douter, je pense à ce que j’ai traversé. Et je sais que je suis capable de passer au travers. Peu importe ce que c’est. Il existe en moi une force insoupçonnée.
Je pense à ma poussée :
- Quand l’effort me semble trop grand.
- Quand je dois prendre mon courage, piler sur mon orgueil et demander l’impossible.
- Quand je relève un défi qui me semble inatteignable.
- Quand je suis fatiguée et qu’il me faut continuer.
J’ai maintenant la force d’aller jusqu’au bout.
Avez-vous atteint un état second en accouchant? Comment cette étape vous a affecté?