Après mon premier accouchement de marde (j’aime ça, dire accouchement de marde, ça me sauve ben des séances de psy), deux fausses couches (because les complications de mon accouchement de marde) et un diagnostic d’infertilité (quand tout va bien…), j’appelle la maison de naissance. Je suis enceinte de bébé 2.
Surprise! Je suis un cas trop compliqué pour eux, mais je garde espoir quand même. T’sais, un A.V.A.C. (accouchement vaginal après une césarienne, pour les intimes) avec une accompagnatrice, ce ne sera pas si pire? Ce ne sera pas chez moi, mais ça va quand même être mieux que la première fois…
T’sais quand la fille se rentre le doigt dans l’œil jusqu’au coude?
J’ai été suivie de près parce que j’avais une grossesse à risque, qu’ils appellent. À 34 semaines, ça ne va pas bien. Ma p’tite a (encore) un retard de croissance et mon chum tourne un film en Abitibi. Il débarque de Rouyn, et ma belle-sœur, qui sauve des vies en plus d’être gynécologue, débarque de Gaspé. Elle ne prend pas le risque de se faire dire que tout va bien alors que je suis aux soins intensifs. Elle commence à connaître la zénitude de mon chum et mon optimisme indestructible.
Pis là, mon corps se met à déconner. Pré-éclampsie. J’hallucine des formes géométriques pis j’ai rien pris, j’vous le jure! « Je vole, sans fumée, sans alcool », comme dirait ma plus vieille.
Ça fait que re-césarienne. Je ne connaîtrai pas les contractions et la fierté d’avoir accouché. Rendue là, je lâche prise…
Les fesses à l’air, en jaquette bleue, pendant que l’anesthésiste prépare ses cocktails, on me demande comment elle va s’appeler, celle-là. « Euh… Vasectomie? » Si seulement vous aviez vu la face de soulagement de tout le personnel médical et surtout de ma belle-soeur!
Vasectomie est née à 34 semaines de grossesse, 3 grosses livres de double menton. Même si elle a un poids de 29 semaines et qu’elle est ratatinée comme une p’tite vieille, elle pète le feu et gueule plus fort que tous les autres bébés réunis en néonatalogie.
Je devrais me réjouir d’être chanceuse dans ma malchance, me réjouir que mon bébé et moi soyons en vie malgré le placenta accréta, le retard de croissance, la pré-éclampsie, les transfusions, le gavage, alouette, mais je n’y arrive pas. J’ai un ou deux bistouris qui m’accrochent dans la gorge.
Je n’arrive pas à digérer le fait que j’ai encore eu une césarienne et que ma fille est hospitalisée. Je suis incapable de quitter l’hôpital le ventre vide, sans bébé sur le siège arrière. Vous aviez raison, la santé, c’est tout ce qui compte, mais je suis vraiment déçue de mes accouchements.
J’ai accouché deux fois, mais je n’ai jamais vraiment eu l’impression d’avoir accouché, comme si cette partie de la maternité restait incomplète.
Et quand le deuil de l’accouchement sera fait (si un jour je réussis à recracher les bistouris), restera celui de ne pas avoir eu mes filles collées sur moi lors de leurs premiers instants de vie.