J’ai eu la chance d’allaiter mon premier enfant durant 6 mois. Mon garçon tétait très bien. Toute ma vie, j’ai cru que boire ou s’alimenter, c’était normal et instinctif chez un bébé. L’allaitement est supposé venir tout seul, le bébé est censé se rendre par lui-même au mamelon et téter. On voit ça dans tous les films ou les cours sur la naissance.
Cependant, j’ai appris à mes dépens que ce n’est pas toujours comme ça. Il y a toujours des exceptions à la règle.
Née prématurément, ma fille ne pouvait pas boire par elle-même. Elle était dans un incubateur, sur soluté, et gavée. J’ai dû tirer mon lait aux trois heures en croyant donner le meilleur de moi même à mon enfant : l’aliment favorisé par tous les pédiatres et nutritionnistes, l’aliment que tout le monde met sur un piédestal.
J’ai dû faire mon deuil de l’allaitement et me « traire » dans la salle d’allaitement entre deux rideaux, aux côtés d’autres femmes dans la même situation que moi. Fatiguée, je persévérais en pensant que c’était l’une des seules choses que je pouvais faire pour ma fille durant son hospitalisation. Je croyais lui donner le meilleur de moi-même.
Plusieurs femmes ne parviennent pas à tirer beaucoup de lait suite à un accouchement prématuré. Moi, j’avais cette chance. J’avais une très bonne production : 1,5 litre par jour dès la deuxième semaine. Quelques semaines plus tard, ma cocotte a fait une entérocolite, une infection de l’intestin. Nous avons eu très peur de la perdre, mais heureusement, les antibiotiques ont été efficaces.
Le lait maternel était contre indiqué après cet événement, donc toutes mes réserves de lait congelé ne me servaient plus à rien. Comment un bébé peut être « allergique » à quelque chose de naturel et qui est censé être la meilleure chose pour lui? Ça me dépasse et ça me fait beaucoup de peine.
Maintenant, plusieurs semaines plus tard, ma fille est à la maison. Elle boit peu au biberon, elle a un tube à gavage pour compléter son alimentation. Elle hurle lorsqu’on lui présente le biberon, elle a mal au ventre, se tortille et pleure des heures durant.
Je suis une mère épuisée qui a mal pour sa fille. Je voudrais tellement que le geste si naturel qu’est se nourrir soit simple pour elle aussi.
Ma fille, je t’aime.