C’est donc beau des enfants qui jouent ensemble. Des enfants qui rient ensemble. C’est encore plus beau, encore plus doux, encore plus toute quand un de ces enfants-là, c’est le nôtre.
Notre enfant qui nous salue, perché sur un module, qui nous crie de regarder comme il descend vite, comme il saute de haut-tellement-haut-le-plus-haut-du-monde. Notre enfant qui s’esclaffe en pataugeant dans l’eau, qui n’a pas peur de se mouiller. Ni dans l’eau, ni dans l’univers social qui lui est imposé.
C’est pas tout le monde, dans la vie, qui a la sociabilité innée, naturelle, spontanée et abondante. Il y a des humains qui ont simplement besoin d’un peu, ou beaucoup, de solitude. Y’en a qui préfèrent la tranquillité aux partys; les repas intimes aux galas; et le silence au bruit. Parmi ces humains-là, y’a pas que des adultes. Y’a des petits êtres qui préfèrent jouer tuseul dans leur salon avec leurs p’tits jouets, plutôt que de crier en gang.
Pourquoi ça nous rassure tant de voir son enfant manquer de doigts pour compter ses amis? De le voir jouer aux mêmes choses que tout l’monde, pas juste sans rechigner, mais même dans la joie et la volonté?
Je ne dis pas qu’on ne devrait pas. J’suis la première à prendre la voie de la zénitude quand j’vois mon fils jouer avec les autres, comme les autres, avec plaisir. Pour moi, c’est rien de moins parce que ça n’arrive pas si souvent.
Mon grand, il est du genre solitaire. Il est du genre à rapetisser plus le groupe s’agrandit. Il aime son p’tit monde, sa familiarité. À la garderie, mon fils a 1 ami. Un. Il fréquente un gros CPE où il croise tous les jours plus d’une centaine d’« amis ». Mais bien qu’ils en portent tous l’étiquette, un seul autre enfant se mérite vraiment le titre d’ami dans le cœur sélectif de mon mini.
Difficile? Pas sociable? Nenon. Juste plus timide, introverti, solitaire. Est-ce qu’introverti, c’est moins bon qu’extroverti? J’pense pas. C’est une question de tempérament, de diversité.
Ça veut pas dire qu’il est toujours tuseul, mon fils. Ça veut pas dire qu’il s’ennuie, qu’il s’emmerde, qu’il est moins heureux que les autres. Les autres qui, parce qu’ils rient en chœur, rient plus fort.
J’arrive maintenant à comprendre tout le beau de cette solitude. J’ai fait ma part de deuils. Imaginer mon enfant qui joue tout seul à la garderie parce que son ami n’est pas là, au début, c’était comme si quelqu’un mettait sa main sur mon cœur pour le serrer. Un peu. Assez fort pour en extraire une larme.
Maintenant, je comprends que s’il reste seul, c’est surtout parce qu’il se sent souvent mieux ainsi. Ses moments en solitaire nourrissent son imagination, impressionnante, grandissante, sans limites. Sa vie intérieure grouille en masse. Il ne s’ennuie pas. Pis plutôt que d’être triste de le voir seul, j’suis fière de voir qu’il est capable d’être seul sans ennui. Qu’il arrive à créer de quoi, en dedans de lui, qui l’anime. Des histoires, des personnages, des scénarios, il s’en invente assez pour meubler tout un espace.
Maintenant, plutôt que de le trouver fragile, j’le trouve solide. Ça ne lui fait pas peur de se retrouver seul avec lui-même et plutôt que de lui nuire, j’pense que ça va lui être ben utile, dans la vie. Dans SA vie.
Reconnaissez-vous votre enfant, dans le mien?