J’ai, dans les derniers mois, eu une expérience un peu rocambolesque en rapport avec mon centre de reproduction. J’ai fait une fausse-couche sans savoir que j’étais enceinte alors que je portais un stérilet. Ma grossesse était accrochée au col de l’utérus. Déjà, je prends le temps de m’excuser à celles qui essaient fort et je pense à ma collègue Vicky qui a écrit là-dessus la semaine dernière, moi je tombe enceinte quand mon homme me regarde langoureusement. Genre.
Vous vous direz que je suis un peu niaiseuse de ne pas m’être aperçue que j’étais enceinte (et pas mal enceinte, en plus). Pourtant, j’ai eu des bébés dans mon ventre avant! Cette fois, pas de symptômes classiques. De la fatigue extrême, c’est tout. Mais avec un déménagement international dans les mois précédents, un papa qui travaille partout sur la planète, des grands-parents à 6 000 km, une rentrée scolaire française pour ma grande, les virus des petites… Je trouvais ça un peu normal d’avoir hâte d’aller me coucher le soir venu. J’imagine que de penser au fait que j’avais un stérilet éloignait complètement cette option de mon esprit.
Plusieurs passages à l’hôpital, échographies, prises de sang et rendez-vous d’appoint plus tard, j’ai dû commencer un petit deuil de cette poussière d’ange qui m’était « tombée dedans », comme le disait Ariane Moffatt. La question qui me hantait du matin au soir était : « est-ce que tu as vraiment le droit d’avoir de la peine? » Après tout, je ne savais pas que j’étais enceinte, et j’avais un moyen de contraception qui était sensé envoyer un message clair à mes ovaires : « Your job is done ».
J’avais déjà fait une fausse couche dans le passé, avant de concevoir mon aînée. Cette fois-là, j’étais à peine enceinte (6 semaines), donc je trouvais ridicule d’être triste. C’était tôt dans la grossesse et je me disais que tant que l’héritier n’était pas rendu à 12 semaines de gestation, il y avait un plus grand risque, donc je ne devais pas en faire un drame. Eh bien, je révise ma position. Toutes les fausses couches se valent.
Non, cette fois-ci, la grossesse n’était ni prévue, ni pré-désirée. Par contre, ce petit bébé était le frère ou la sœur de mes enfants. Il a une place dans une fratrie. Cette fois-ci, c’est donc pour moi plus concret. Je peux plus facilement imaginer des petits traits communs, physiques ou de personnalité, ayant déjà ses deux grandes sœurs sur qui baser mon imagination. Un petit nez pareil au reste de ma famille, une détermination sans bornes comme mes grandes.
Je pense maintenant qu’on devrait se donner le droit de vivre le deuil d’une grossesse perdue peu importe la situation. Dans ces cas-là, il n’y a pas vraiment de circonstances atténuantes. C’est un tas de trucs qui s’envolent avec cette minuscule petite vie. Un enfant, une sœur ou un frère, des moments de folie, de bonheur en famille, des périodes plus difficiles qui nous font travailler sur nous-mêmes… Ce n’est pas qu’un embryon de quelques semaines dont on connaissait la précarité « de toute façon ».
Et vous, avez-vous eu de la difficulté à vous accorder le droit d’avoir de la peine après une fausse couche?