Quand on vit la maladie d’un enfant puis son décès, on change. Ça, personne ne le remet en doute. Mais vient un moment où on le dit sans trop en comprendre soi-même tout le sens. L’ampleur de ces changements n’est pas toujours si évidente spontanément.
Je sais qu’il y a la moi d’avant Lydia, puis celle suivant le diagnostic, il y a aussi eu celle suivant de très près son départ… Et celle d’aujourd’hui. Celle qui vit depuis, la femme que je suis devenue, maintenant, après 9 ans à vivre avec le deuil de mon enfant. En quoi cela m’a transformée… Bien, c’est ce que je me suis demandé!
Ce que je sais, aujourd’hui, c’est que ça n’a pas fait de moi une mère parfaite et je trouve ça important de le dire. Ça a par contre fait de moi une meilleure maman.
Le temps passé avec ma fille m’a appris à accepter la différence et les difficultés. Lydia n’était pas comme tous les autres enfants. Elle avait certaines difficultés liées à sa maladie. J’ai, en fait nous, avions décidé que nous allions la pousser à dépasser ses limites au lieu de la surprotéger et de s’apitoyer sur son sort. Et cela, je l’applique encore dans mon éducation avec mes autres enfants. Je les amène à dépasser leurs limites, à trouver leur force intérieure pour faire face à la peur. Je leur transmets l’espoir que dans la vie tout est possible, qu’il suffit d’y croire. Et je sais que chacun d’entre eux aura son propre parcours et que je dois m’adapter à chacune de leur personnalité.
Et les limites, moi aussi je les dépasse. Quand j’ai peur de faire le saut pour un changement, ou que mon corps veut abandonner pendant un entraînement, l’image de ma fille qui se bat me revient et à ce moment là, je ne peux faire autrement que de foncer. J’en suis à chaque fois récompensée… Et je réussis!
Le décès de ma fille m’a appris à accepter le fait que JE ne contrôle pas tout. Que malgré mon bon vouloir, la vie décide parfois autrement pour moi. Le fait de ne pas toujours avoir le contrôle sur les évènements ne m’enlève pas mon pouvoir de décision sur la façon dont je décide d’y faire face. Après le départ de ma fille, je me suis retrouvée devant deux avenues différentes : soit je m’asseyais là et je braillais le reste de ma vie; soit je faisais exactement ce que je lui avais demandé à elle pendant un peu plus de deux ans, me battre! J’ai choisi la deuxième! Celle qui allait me faire grandir et cheminer dans l’épreuve. Après tout, la vie est belle et mérite qu’on se batte pour elle!
Même si suite à son départ, j’ai vécu un long moment avec l’impression que ce que les autres vivaient comme épreuves n’étaient rien à côté de la perte de mon enfant, avec le temps et l’adaptation à ma nouvelle vie sans elle, je sais que c’est différent aujourd’hui. Je suis plus ouverte aux autres, je me sens capable de bien saisir leur souffrance, de les comprendre, mais aussi de les aider à voir que c’est possible de s’en sortir.
Je sais aussi que la vie est trop courte, qu’il faut en profiter, et ça guide mes choix quotidiennement. Je ne vous mentirai pas en vous disant que je suis toujours madame bonheur qui vit au pays des câlinours où tout est rose et joyeux. J’ai mes mauvaises journées et mes moments de découragement… Mais je ne m’y terre pas bien bien longtemps.
Lydia m’a fait comprendre que chacun réagit différemment devant l’épreuve. Il ne faut pas juger l’autre sans avoir chaussé ses souliers. On ne sait pas quels sentiers ils ont empruntés!