En octobre dernier, je donnais ma conférence au Salon de l’autisme TSA du Québec. Après la brève période de questions, puisque j’avais encore buster mon temps, une dame est venue me voir pour me dire merci. Habituellement ce sont des parents qui assistent à mes conférences donc j’étais surprise de voir, toute seule, une femme qui avait l’âge d’être une grand-maman.
En effet, sa petite fille avait reçu un diagnostic d’autisme et depuis le début de l’investigation elle ne reconnaissait plus sa fille. Celle de qui elle avait toujours été si proche était devenue distante et aussi protectrice qu’une lionne lorsque sa mère tentait d’interagir avec sa petite-fille. Elle semblait en vouloir à la terre entière d’être celle qui avait tiré le billet de l’autisme pour son enfant.
La grand-maman venait à ma conférence pour tenter de comprendre les réactions de sa fille. Elle disait mieux comprendre, mais que je lui avais également mis du baume au cœur avec ce tabou qu’est que les grands-parents aussi vivent un processus d’acceptation de la différence de leur petite-fille ou petit-fils.
Ses yeux se sont remplis de larmes et elle m’a avoué qu’elle aimait sa petite fille, mais qu’elle souffrait de ne pas savoir comment agir pour qu’elle ne fasse pas de crise en sa présence. Elle me confiait devenir nerveuse et faire des gaffes que sa fille lui reprochait par la suite. Elle me demandait conseil sur quoi faire et comment le faire. Demeurez calme, lui ai-je dit. Dites-vous que votre petite fille a de petites antennes qui détectent toutes les sources de stress. Assoyez-vous par terre avec elle. N’allez pas de tous les côtés autour d’elle, comme nous avons tendance à le faire quand nous sommes nerveux. Laissez-la venir à vous. Même si vous mourez d’envie de la prendre dans vos bras. Soyez patiente et ouverte. Le reste viendra en temps et lieu.
Je lui ai également conseillé de parler de ses sentiments avec sa fille. Probablement que sa fille était tellement prise dans son propre processus d’acceptation, qu’elle n’était pas consciente que sa mère aussi en vivait un.
Cette peine, ce sentiment d’incompétence qui nous habite au début, nos parents le vivent en double. Face à nos enfants, mais face à nous aussi. Ils se sentent impuissants face à notre douleur et nos combats. Ils voudraient tant la prendre cette douleur et nous permettre de nous reposer comme lorsque nous étions petits et qu’un simple bisou effaçait tous les maux. Un parent c’est pour toujours. Ça fait mal quand on sent que son enfant, même quand il est grand, souffre et que nous sommes là, impuissants. Souvent nos parents souhaitent nous aider, mais nous ne leur en laissons pas la chance. Nous ne devons pas oublier que nous aussi au début, nous n’étions pas très à l’aise avec la différence et nous faisions des gaffes.
Elle est repartie avec mon livre, en le serrant sur son cœur, comme si en 1 h 30 je lui avais donné des réponses, mais surtout le droit de vivre toutes les émotions qui se présentaient à elle depuis qu’elle avait appris que sa première petite fille était différente.
Cette semaine, j’ai reçu un message de cette grand-maman. Sa relation avec sa fille va beaucoup mieux et elle me décrivait sa petite fille comme sa perle rare qu’elle découvre au fil des jours. Les rapports sont visiblement plus harmonieux entre les trois générations maintenant que chacune respecte le rythme de l’autre.
Et vous, vos parents? Comment ont-ils vécu l’annonce de la différence de votre enfant?