Vous avez envie de créer un moment de malaise dans une discussion avec des amis qui sont parents? Posez-leur la question suivante : « Avez-vous un enfant favori? » Rares sont ceux et celles qui ne répondront pas qu’ils aiment tous leurs enfants également. Pourtant, je l’avoue ici malgré cet immense tabou, j’ai un enfant favori. Pas un enfant que j’aime plus, mais plutôt un enfant avec lequel c’est plus facile, plus spontané. La discipline, ses intérêts parmi les jouets, ses goûts, sa personnalité… Tout me parle.
Cela dit, je me jetterais sans réfléchir une seule seconde devant un autobus pour sauver n’importe lequel de mes trois enfants. Je ne sais pas non plus lequel je choisirais si j’étais placée devant le Choix de Sophie (ce livre qui a été converti en film dans lequel une mère juive doit choisir entre ses deux enfants en arrivant dans un camp de concentration durant la Deuxième Guerre mondiale).
À mon avis si, en tant que parents, nous ne sommes pas à l’aise de nous avouer qu’il est possible d’éprouver des préférences, il est encore plus difficile d’agir de façon neutre face aux enfants. Je connais mon penchant donc je compense rationnellement pour ne pas favoriser un enfant plus qu’un autre, que ce soit dans mes démonstrations d’affection ou par mes décisions.
Une psychologue américaine, Ellen Weber Libby a écrit tout un bouquin à ce sujet qui s’intitule « The favorite Child ». Elle y explique que les parents ont souvent un sentiment plus positif à l’égard de l’enfant qui pose le moins de challenges à ses parents. Selon elle, le plus important est de ne pas créer une compétition malsaine entre les enfants afin d’obtenir le titre du « petit préféré » des parents. Elle y mentionne également que plus le déni des parents est élevé à cet égard, moins ils sont aptes à gérer leurs enfants de façon équitable.
L’idée n’est pas de mettre un des enfants de la fratrie sur un piédestal, mais plutôt de s’avouer, en tant que parent, qu’il est possible d’avoir des préférences et que celles-ci varieront vraisemblablement à travers les années. L’important est de ne pas créer un statut permanent « d’enfant favori » pour l’un d’entre eux. Cela aurait définitivement l’effet de créer une dynamique toxique entre les enfants et un sentiment de rancœur envers les parents.
C’est exactement dans cette optique que mon texte est anonyme. Je ne voudrais pas que l’un de mes gamins m’imprime une copie de ce texte dans 10 ans et qu’il en souffre! J’ai cependant la conviction qu’il est important de se déculpabiliser lorsque l’on éprouve une préférence parmi les enfants. Ce sont des sentiments parfaitement humains et naturels. Ce qui compte, c’est ce que l’on en fait!