Ariane, ma fille de 7 ans, a un rêve très puissant : elle veut devenir apicultrice. C’est une idée fixe depuis qu’elle a 5 ans. Elle a commencé par raconter en boucle qu’elle voulait avoir des ruches, puis elle a appris à dire « apiculture » en zozotant comme c’est pas permis d’être plus cute.
Elle veut tellement devenir apicultrice que quand on a des abeilles dans nos fleurs, elle saute de joie et s’assied sur ses talons pour les regarder butiner, les joues roses et les yeux brillants. Elle veut tellement devenir apicultrice qu’elle a fait des plans de productions agricoles et animales complémentaires pour vivre de sa terre et pouvoir nourrir ses abeilles. Elle veut tellement devenir apicultrice que, cet été, quand elle s’est fait piquer par une guêpe, elle a d’abord cru mourir de tristesse plutôt que de douleur, parce qu’elle croyait qu’une abeille l’avait trahie.
Ariane n’a pas une petite folie en tête, vous le voyez bien, hein? Ariane a un projet. Une vision. Une idée… et un contrat signé en deux copies avec son parrain qui a cru en elle et a demandé d’être le premier à acheter un pot de nectar doré signé Ariane-la-banane-au-miel.
Pourtant, même si Winnie l’Ourson lui-même s’active moins fort qu’elle en parlant de miel, de ruches et d’abeilles, elle continue de se faire rabrouer par #LesAdultes, sous prétexte qu’elle est petite et naïve. Je trouve que c’est terriblement frustrant! On jase, là : pourquoi est-ce que tant d’adultes se sentent subitement obligés de péter la bulle des enfants quand ils voient un rêve briller dans leurs yeux? Ma fille ne parle plus de ses projets professionnels comme avant, parce qu’elle a déjà tout entendu et qu’elle en a marre des réponses poches :
- C’est trop dur de vivre de production agroalimentaire, ma chouette…
- Ah, mais au rythme où ça bouge, il n’y aura même plus d’abeilles quand tu seras en âge d’avoir des ruches!
- Ah, t’es mignonne… *fin de la conversation directe, on préfère commenter entre adultes* Elle a le temps de changer d’idée, hein! Des abeilles… ah ah!
- *Carrément, on l’ignore* Pourquoi donc qu’elle veut faire du miel? C’est votre idée?
Excusez-moi, les gens? Les enfants ne sont pas stupides. Ils rêvent. Ils construisent. Ils espèrent. C’est quoi cette tendance à ne pas les prendre au sérieux quand ils affirment qu’ils vont aller au bout de leurs rêves? Oui, Ariane peut changer 100 fois d’idée encore. Sauf que c’est une enfant, elle vit au jour le jour et au moment où elle rêve, elle le fait pleinement. Alors, de grâce : prenez-la au sérieux, de même que tous les autres petits humains futurs adultes innovateurs qui en ont beaucoup à nous réapprendre sur l’art de se projeter dans le bonheur!