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La naissance prématurée de mes jumeaux
Crédit: Pixabay
Ma première grossesse ne s’est pas déroulée comme je l’aurais souhaité. J’étais enceinte de jumeaux et pour celles qui ne le savent pas, une grossesse gémellaire est d’emblée considérée à risque. Et moi, je fais partie des statistiques de grossesses gémellaires qui rencontrent des complications. J’ai accouché à 32,1 semaines, à sept mois de grossesse; autrement dit, deux mois trop tôt.
 
Quand mes garçons sont nés par césarienne, je les ai vus environ 3 quarts de seconde avant qu’ils aillent rejoindre une équipe médicale prête à leur prodiguer les soins. Je me souviens du sentiment de soulagement quand j’ai entendu mes deux bébés émettre des petits sons une fois venus au monde. C’est à ce moment-là que notre parcours en néonatalité a débuté. Un parcours parsemé d’embûches, de craintes, de victoires, de peurs, de hauts et de bas, de rencontres, mais surtout d’amour.
 
D’abord, à peine remise de ma césarienne et de mes émotions de ce choc que fut leur naissance prématurée, il m’a fallu apprivoiser ce nouvel environnement qui allait être le nôtre pour un bout de temps. Avec le recul, mes deux nuits d’hospitalisation dans la section mère-enfant demeurent une des situations les plus difficiles que j’ai vécues dans ce parcours. J’ai passé la nuit à entendre de tout petits nouveau-nés pleurer auprès de leurs parents, tandis que mes bébés à moi n’étaient pas à mes côtés, mais plutôt seuls dans leur incubateur à l’autre bout de l’hôpital, dans le bloc 5 qui me semblait à ce moment être aussi loin que l’autre bout du monde.
 
Les 2-3 premiers jours ont aussi été particulièrement éprouvants, car mes garçons ont fait une jaunisse et ont dû se retrouver sous la lumière bleue un bon 24-48 heures. Partout dans l’unité néonatale, on voyait des affiches qui faisaient la promotion de l’importance capitale sur le bébé prématuré de faire du peau à peau, des 1001 bienfaits pour la santé du bébé de cette pratique… et nous étions dans une situation où le personnel de l’hôpital me recommandait plutôt de les laisser dans leur incubateur, branchés de plusieurs fils sur de grosses machines bruyantes, avec les petites lunettes qui cachaient leurs yeux, sous cette lumière froide et bleue. J’avais un sentiment horrible d’impuissance et de culpabilité. Mes garçons avaient besoin de ma chaleur, de se sentir collés contre moi, de savoir que j’étais là. Les heures étaient interminables. Mes larmes coulaient. Je ne me souviens pas si j’ai pleuré une heure, cinq heures, une journée entière ou plus. Je me souviens juste que je ne n’avais plus de larmes. 
 
Heureusement, malgré que cela m’ait semblé durer une éternité, les lumières bleues sont parties et j’ai enfin pu commencer ma nouvelle routine de maman de bébés prématurés.  Du matin au soir, mon temps était dédié à faire du peau à peau, à tirer mon lait aux trois heures top chrono, à identifier et dater le lait tiré, à aller le porter au réfrigérateur dédié au lait maternel, à revenir faire du peau à peau, ainsi de suite. La boucle continuait jour après jour.
 
Les jours ont passé, puis les semaines ont passé. J’avais l’étrange sensation que la vie extérieure n’existait plus.  Le temps était figé. Mais le temps continuait de s’écouler, et l’hiver froid avait laissé place au joli printemps. Ce passage a été un autre moment majeur dans notre parcours, car après un si long séjour, j’en avais assez de cette routine. J’en avais assez des bruits constants des machines qui résonnaient dans mes oreilles et dans les petites oreilles de mes garçons. J’en avais assez de mon intimité inexistante. J’en avais assez d’attendre notre retour à la maison. Ce jour-là, le 21 mars, j’en avais assez de voir les autres parents de bébés prématurés autour de moi obtenir leur congé les uns après les autres.
 
J’ai pleuré de colère, de tristesse, de rage, d’impuissance, d’impatience et d’incompréhension quand mon bébé a fait une désaturation ce 21 mars. Je voyais la ligne d’arrivée tout près… et nous avons plutôt dû reculer de sept pas. Oui, quand un bébé fait un tel événement, nous devons attendre 7 jours sans incident avant de pouvoir quitter. Ces derniers 7 jours m’ont paru encore plus longs que les 6 semaines précédentes que nous venions de vivre. J’avais si hâte que nous soyons à la maison, dans notre confort et entourés de calme.
 
Et ce fut finalement notre tour d’avoir le congé d’hôpital tant attendu; nos petits garçons étaient rendus assez grands pour rentrer.  Ce fut enfin notre tour d’installer maladroitement nos petits bébés dans leur coquille, notre tour de faire des aurevoirs à l’équipe d’infirmières avec qui nous avions créé des liens, notre tour de quitter l’unité de néonatalité avec l’immense sentiment de fierté d’avoir passé au travers et, surtout… le coeur débordant d’amour d’enfin pouvoir commencer notre vie de famille à 4. À la maison, tous ensemble, enfin.
 
Est-ce que votre enfant est né prématurément, vous aussi? Comment s’est déroulé votre séjour à l’unité néonatale?
 
Vous avez une histoire à partager? Écrivez-nous au info@tplmag.com
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