Il y a quelques semaines, j’écrivais que j’avais pris goût à ma nouvelle routine avec ma fille, en télétravail. La voir grandir, apprendre, s’épanouir. Prendre le temps de jouer, de cuisiner, d’aller dehors. Les heures de travail éclatées, mais le bonheur recentré. Puis, ce courriel : votre enfant aurait une place au CPE le 8 juin.
Le courriel tombait à point, au moment où mon conjoint reprenait son horaire atypique au travail, des nuits, des 12h, des trop-d’heures. Encore plus de journées à jongler avec télétravail et enfant. Encore plus d’heures à lui dire de rester tranquille un peu, le temps d’un appel, d’un courriel. Avec le beau temps qui se pointait le bout du nez en plus, ça me prenait tout mon petit change pour me motiver à fixer un écran dans le bureau, alors que ma fille me demandait toutes les 5 minutes quand on pourrait aller jouer dehors.
Début mai, j’étais convaincue que je ne la retournerais pas au CPE tant que j’étais en télétravail, ou au plus tard en septembre pour ne pas perdre la place (si difficile à avoir). Une décision axée sur sa santé, notre routine, mais aussi mon envie d’être avec elle dans notre petite bulle quelques mois de plus. Juste l’idée de penser au retour à la normale me serrait le coeur. Comme à la fin du congé de maternité.
Puis, j’ai changé d’avis. Et je suis contente, finalement. Même si ma gorge se noue un peu quand je regarde par la fenêtre de mon bureau et que je vois sa petite glissade, me rappelant qu’on profitera un peu moins de la vie main dans la main.
Le jour J est arrivé, ma fille est retournée au CPE, et elle avait tellllement hâte. On l’a préparée quelques jours avant, pour adoucir la transition. Ma fille a seulement 2 ans et demi. Assez grande pour bien s’adapter et comprendre ce que je dis, mais assez jeune pour ne pas comprendre l’ampleur de la situation, le coronavirus et l’impact.
« Tu vas avoir une nouvelle doudou juste pour toi pour les dodos au CPE! C’est ton éducatrice qui va te la donner. Chanceuse! » Elle a répété à tout le monde qu’elle aurait une nouvelle doudou, juste à elle, le sourire aux lèvres. « Je ne pourrai pas aller te reconduire à ton local, c’est ton éducatrice qui viendra te chercher à la porte. Elle a si hâte de te voir! » En arrivant à la porte, elle regarde par la fenêtre et voit ses amis. Elle a si hâte qu’elle se lave les mains le plus rapidement possible avec son éducatrice et court vers les autres. Je n’ai même plus de câlins…
Et puis, troisième jour de garderie, elle s’est levée et est venue me dire qu’elle voulait aller jouer avec son amie, pas rester avec maman à la maison pendant le travail. On est même parties plus tôt ce matin parce qu’elle avait enfilé ses souliers, sa casquette et sa veste, et attendait à la porte, impatiente.
J’appréhendais tant ces premiers jours, ce retour à la routine. En plus, elle a changé d’éducatrice. Ajoutons à cela les mesures de distanciation et d’hygiène. Je voyais ça si gros.
Mais non. Ma fille est aux anges d’avoir recommencé le CPE, et moi, je peux travailler plus de 20 minutes sans être déconcentrée. J’avais le sentiment de l’avoir abandonnée, d’avoir choisi mon travail au lieu de son bien-être. J’admets que ce sentiment me remonte à la gorge quelques fois par jour. Mais quand je la vois, tout sourire, aller ou revenir de la garderie, je me dis qu’au fond, c’était le bon choix pour nous.
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