Récemment, j’ai publié un texte sur le site au sujet du privilège et de l’importance de le faire reconnaître à nos enfants. Mais en dedans de moi, quelque chose me chicote aussi sur le privilège d’être un parent et surtout d’être le type de parent qu’on veut.
Voyez-vous, en tant que nouvelle maman de mon premier garçon, j’étais la mère que j’ai toujours voulu être. Je ne me suis pas « empêchée » de faire quoi que ce soit. Nous étions les premiers dans notre groupe d’amis à avoir un bébé et c’était important pour moi de prouver que ça ne changerait pas qui on est.
Alors on le traînait. Il est venu avec nous dans des festivals, au chalet, dans une tente, dans des longs road trip, des microbrasseries, des partys, des randonnées. C’était facile et c’était bien amusant. En dedans de moi, je ressentais une certaine fierté à me dire que j’avais tellement réussi. J’étais LA maman cool, celle qui concilie tellement bien maternité et vie sociale. En autant que nous avions le parc, la poussette et le porte-bébé dans le coffre de l’auto, on faisait absolument n’importe quoi.
Trois ans plus tard, nous avons eu notre deuxième enfant et le contexte était vraiment différent. Mon petit bébé prématuré a passé un long moment à l’hôpital et lorsque nous sommes enfin rentrés à la maison, nous étions en mode sauvegarde pour ne pas qu’il attrape de microbes.
Mon bébé a passé les premiers mois de sa vie à la maison, entre quatre murs. L’hiver était super moche, et on ne pouvait pas vraiment se promener en poussette dehors avec la glace. Et de toute manière, les médecins nous avaient fortement recommandé d’éviter tous les lieux publics. Pas de restaurants, pas de partys. Et autant que je n’aime pas dire ça, mais mon bébé était difficile. Il voulait être dans nos bras 100% du temps (vive l’écharpe). Il vomissait tous ses boires. Il pleurait en auto, pleurait dans la poussette, ne voulait pas dormir dans le parc…
Lorsqu’il s’est mis à vieillir, les choses se sont un peu améliorées. Il tolère la voiture, il dort bien ailleurs, mais les repas sont difficiles et il est encore fragile côté santé. Nous avons récemment dû le laisser à la maison avec grand-maman parce qu’il était trop malade pour prendre l’avion avec nous.
On s’entend que je réalise grandement le privilège que j’ai d’avoir mon garçon en santé avec nous. Il a quelques séquelles de sa prématurité, mais rien de majeur. Et les choses auraient tellement pu être plus graves, plus tristes. Mais le point que j’essaie de partager ici, c’est qu’on ne décide pas toujours du type de maman qu’on va être. Il y a un certain privilège associé à avoir un enfant en santé et/ou un enfant “facile”. Il y aussi un énorme privilège à avoir les moyens financiers pour faire des activités et voyager.
Mais par-dessus tout, ce que je veux dire, c’est que lorsqu’on clame haut et fort qu’on est tellement fière de ne pas avoir changé son mode de vie pour son enfant, ou qu’on est ben ben contente d’avoir tenu notre promesse à nous-mêmes de continuer à faire un paquet de trucs, c’est un brin condescendant envers les gens qui n’ont pas cette capacité. Parce que lorsqu’on est prise dans la maison avec une dépression post-partum, un choc post-traumatique ou que l’on vit une situation particulière qui fait en sorte qu’on n’a pas cette force physique et mentale là, on voudrait donc bien avoir cette chance. Et dans la vie, tout n’est pas toujours une question de volonté.
Je dis tout ça avec énormément de bienveillance. J’ai été cette maman, et j’étais vraiment contente de moi-même. Mais maintenant, je sais. Je sais c’est quoi être de l’autre côté de la fenêtre, à regarder des familles avoir une insouciance si belle et si pure. Et j’encourage les gens à faire cet effort et essayer de continuer d’avoir un train de vie qui est en lien avec leurs désirs.
J’espère juste qu’aujourd’hui, mon texte vous fera prendre une petite seconde pour réaliser que c’est un grand privilège d’être le parent qu’on voudrait être.