J’ai eu la chance d’allaiter mes trois enfants et j’ignore quelle aurait été ma réaction si je m’étais retrouvée dans l’incapacité de le faire. Spontanément, je crois que j’aurais opté pour de la préparation pour nourrissons. Cela semble être la solution logique… Mais qui sait? De plus en plus, le partage informel de lait (non encadré par une banque reconnue) gagne en popularité. Plusieurs groupes émergent sur Facebook, tel que Human Milk 4 Human Babies – Québec, et servent d’intermédiaires entre les femmes désirant offrir du lait maternel et les parents à la recherche. Même si cette pratique demeure très taboue, elle met en lumière le besoin qu’ont ces parents qui préfèrent offrir le lait d’une autre demeure plutôt que d’opter pour les préparations commerciales.
Je me suis impliquée à Nourri-Source Montréal pendant 4 ans. C’était une petite bulle qui différait des statistiques québécoises sur l’allaitement. Tout mon entourage allaitait et quelques années étaient la norme. Dans ce safe space, j’ai entendu des histoires de toutes sortes et j’ai vu des allaitements de tous genres. Dans cet environnement d’ouverture et de confiance, certaines mamans affirmaient avoir allaité le bébé d’une amie ou qu’une autre femme avait donné le sein à leur enfant. Je me souviens que c’était une confidence, de l’inhabituel. Pourtant, c’est une pratique vieille comme le monde! Est-ce qu’on trouve cela curieux simplement parce qu’on n’est pas « habitué » de le voir?
Qu’en est-il officiellement?
Dans un avis publié en mai 2019, Santé Canada rappelle aux parents les dangers liés à l’utilisation de lait partagé informellement et leur conseille plutôt de se tourner vers des banques de lait approuvées. Cela dit, la quantité de donneuses étant limitée, ce lait est destiné aux soins des grands prématurés et ne couve pas non plus complètement cette demande. Donc, quel autre choix reste-t- il aux parents qui désirent éviter les préparations pour nourrissons?
Un peu dans le même sens, l’Academy of Breastfeeding Medecine déconseille aux mamans de se procurer du lait sur Internet, mais conseille par contre aux parents de trouver eux-mêmes une ou des donneuse(s) et de s’assurer de l’état de santé de ces dernières.
Il y a d’autres avis…
En juin 2019, le Mouvement Allaitement Québec (MAQ) a réagi à l’avis de Santé Canada par un communiqué de presse et exprime sa déception quant à la position exprimée. Dans ce communiqué, on retrouve différentes recommandations en lien avec le partage de lait comme: qu’il soit reconnu comme une pratique qui existe et abordée en cours prénataux, qu’il soit présenté comme une pratique plus sécuritaire que les préparations pour nourrissons et que des efforts supplémentaires soient mis en place pour développer la banque de lait maternel d’Héma-Québec (MAQ).
L’un des points intéressants – à mon avis – de la position du MAQ est l’importance d’encadrer une pratique qui, clairement, existe de toute façon. Ne serait-il donc pas plus sécuritaire, justement, d’ouvrir le dialogue, sans jugement ni tabou, afin que les femmes qui désirent donner ou les parents qui désirent se procurer du lait soient mieux informés et outillés?
Qu’en pensez-vous?