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Ma gastrophobie inassumée
Crédit: Unsplash

Gastrophobie : n.f.

Terme inventé aux suites d’épisodes répétés de gastroentérite, servant à identifier une crainte excessive – voire disproportionnée – dès qu’il est question de tout ce qui touche le champ lexical de la gastro.

Ex. : nausées, crampes, panier d’épicerie, piscine à balles, fête d’amis, etc.

Synonyme(s) : hypocondrie spécifique au rotavirus, au norovirus ou à toute autre souche apte à vider le contenu digestif.

 

À ce jour, Google et le Larousse m’indiquent qu’il n’y a pas de licence d’utilisation de ce nouveau mot. Je suis donc malheureuse détentrice du brevet et frais titre de « Gastrophobe ». Merci, Word, de ne plus me corriger, dans l’élaboration de ce texte appétissant.

Comprenez-moi bien, je ne suis nullement enchantée par cet état d’anxiété digestive. Je ne suis pas une miette ravie d’avoir concocté cette palabre authentique, inspirée de faits fraîchement vécus et vaincus.

Huit épisodes distincts, tous ravageurs, ont frappé ma maisonnée, dans les deux dernières années. Oui, oui, vous avez bien lu. HUIT! Huit. Comme dans 8 périodes d’au moins 7 jours à huis clos, tous en même temps, ou à la queue leu leu. Huit. Comme dans 8 séquestrations prolongées volontaires et pourtant bien involontaires. Huit. Comme dans huit…whattttttt?

Pardonnez-moi cet anglicisme. Tout ce qui sort de ma bouche – hormis vous-savez-quoi – en phase aiguë est pure légitimité et ponctué d’onomatopées généreuses. Sujet délicat, sans finesse et obsession mentale partagée par nombreux parents, vous me direz. Dans mon cas, ça frise la démesure. Mon esprit s’emballe au moindre rot mal placé. J’appréhende les fêtes, les retours de longs week-ends, les gels-dégels infinis du Québec.

J’ai développé un 6e sens pour flairer un haut potentiel de contagion et je retire mon coco de la garderie dès que je flaire une onde de probable vomi. La gastro m’obsède, me magane les tissus neuronaux. Mon pif est brûlé par l’eau de javel ou le ressac digestif maintes fois passés par là. Mes mains se décomposent en mode nettoyage intensif.

C’est du délire, la gastrophobie. Je vous épargne la série de manies que j’adopte dès que ce foutu virus frappe à ma porte. Avant l’Halloween, je me demande qui osera sonner chez moi, déguisé en vilain germe? Nul besoin de décorations; ma maison est visiblement hantée par le spectre de la fameuse grippe gastrique. Au final, on jurerait un mauvais film d’horreur dont la bobine commence à m’user la caboche. Ce soir, au box-office : Entrailles déchaînées, suivi de Alien gît dans mon gosier. PG 18+. Gastrophobes s’abstenir.

Ou est-ce plutôt un drame cinématographique, cette série d’infortunes digestives? Je ne sais plus, au fond; la gastrophobie me fait perdre la boule. Peut-être est-ce finalement une romance digne des plus mauvais scénaristes? Rencontre avec ma porcelaine me semble un titre adéquat.

J’ai longuement réfléchi, car oui, il me reste encore un peu de contenu cérébral, dans toute cette histoire pas si banale. La gastroentérite coûte cher, écologiquement parlant (papier, eau, gaspillage de nourriture, etc.), monétairement (absentéisme, produits de nettoyage, retraits de la garderie) et socialement (absence de contacts humains favorables au développement du bien-être général). Mais elle a une finalité. Usuellement positive. Rien à voir avec tout ce qu’on peut s’imaginer, au cœur de Ste-Justine.

Je suis gastrophobe – inassumée – prête à entreprendre une démarche de thérapie de désensibilisation cognitivo-comportementale. Je suis bien loin de déclarer perdue notre cause familiale… ou notre santé à long terme. En attendant le prochain épisode (gastrophobie oblige), je savoure le goût des aliments et m’abstiens vigoureusement de régime ou de toute autre privation culinaire nécessaire à mon fonctionnement résiduel.

Êtes-vous gastrophobe?

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