J’avoue que ce n’est pas mon premier texte qui traite du fait que ma fille grandit un peu trop vite à mon goût. Il s’agit de mon leitmotiv des derniers mois, et vous l’exprimez par écrit m’aide à canaliser toutes ces émotions : tristesse, terreur, fierté…
Je sais pertinemment que mon enfant se dirige vers cette transition importante entre son enfance et sa vie d’adulte. Bien qu’on en soit encore qu’aux prémices, c’est régulièrement que j’en reçois les rappels : ses goûts, sa relation avec moi, sa définition du jeu, sa vision des choses, tout cela a évolué à une vitesse incroyable. En l’espace de quelques mois, elle est passée d’une enfant craintive à une jeune fille plus indépendante et responsable.
Le coup de cette semaine, ce fut l’inscription pour l’année scolaire 2019-2020. Je savais pertinemment qu’on était rendu là. Je dis avec fierté aux connaissances qui me demandent de ses nouvelles que ma fille est déjà en 6e année du primaire. Ce n’était pas un fait surprenant.
Mais lorsque j’ai reçu le courriel d’inscription, lorsque j’ai cliqué sur le lien et que j’ai accédé à son dossier, lorsque j’ai vu les mots École secondaire de la Cité-des-Jeunes, mon cœur a sauté un bond. Ces mots, luisant sur l’écran, avait une consonance excitante et terrible tout à la fois. Un peu comme si je perdais un peu plus ma fille.
De quoi ai-je peur? Ma fille est prête. Ma fille est responsable. Ma fille est douce, honnête, capable de prendre sa place et de la laisser aux autres selon la situation. Ma fille est douée académiquement, elle a soif d’apprendre. Ma fille a des rêves, des ambitions. Ma fille a une vie à vivre. Une vie dans laquelle j’ai un rôle à jouer certes, mais dans laquelle je ne suis pas au premier plan tout le temps.
Et c’est ce qui est si difficile. Pour moi, elle est pratiquement tout mon univers. Elle est ma source de fierté, ma motivation à bien des égards. Plusieurs des grandes décisions que j’ai prises les dernières années ont été motivées en partie par elle.
Et je sens qu’elle me glisse des doigts, tout doucement. Elle a besoin de moi, mais un peu différemment. Je dois m’adapter à cette nouvelle réalité, je dois savoir trouver ma place à ses côtés. Je dois devenir une mère alliée, pas une mère ennemie.
Avec mon secondaire sont venus quelques problèmes. Je ne peux pas dire que ce fut la partie de mon existence que j’ai préférée. Je me suis sentie seule, je me suis éloignée de ma propre mère pour un temps. J’ai perdu mon père de manière irrémédiable. Je me suis sentie incomprise parce que je ne comprenais pas encore la vie. Est-ce que je la comprends davantage? J’ai la prétention de croire que oui, mais je suis consciente d’avoir encore du cheminement à faire.
Je veux que ma fille soit heureuse. Je veux que ma fille ne souffre pas trop des erreurs et des choix qu’elle fera. Mais par dessus tout, je veux que ma fille sache que nous, ses parents, sommes avec elle quoi qu’il arrive.
Qu’il est parfois difficile de voir un oiseau qu’on a nourri, bercé et choyé s’envoler pour vivre sa propre aventure. Mais l’amour sincère, c’est aussi d’oublier sa propre peine et ne pas le retenir, lui laisser suivre sa propre voie.
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Alors ma fille fera son entrée à la grande école l’année prochaine, que j’y sois prêt ou pas. La vie va vite. J’essaie de profiter de chaque petit moment volé à ce qui lui reste d’enfance. Et je la regarde grandir en essayant de mettre dans mon regard davantage de fierté que d’amertume.