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Cannabis et opinions divergentes
Crédit: Wesley Gibbs/Unsplash
Depuis la légalisation du cannabis le 17 octobre dernier, j’ai l’impression d’être bombardée de constats plutôt polarisés. Pour ou contre, poteux vs prohibitionnistes, discours banalisateurs vs discours moralisateurs. D’un côté, on semble nous envoyer le message que le pot, c’est le démon et que l’apocalypse s’en vient. De l’autre côté, on tente de nous convaincre que c’est le remède miracle à absolument TOUT, du cancer à l’autisme, de l’anorexie à l’obésité. Oui oui, j’ai lu tout ça au courant des derniers jours! Le manque de nuance m’irrite, tout comme le manque d’écoute et d’empathie entre les clans qui semblent se relancer l’un et l’autre.
 
Nos expériences personnelles viendront toujours teinter nos opinions et nous créer des biais. C’est inévitable. C’est pourquoi, depuis quelques jours, je suis ambivalente, mais surtout irritée par certains commentaires lus et entendus de part et d’autre. Dans ma vie personnelle, le cannabis a entraîné plus de conséquences néfastes que de highs agréables. Mon conjoint ayant un casier judiciaire pour possession, nous avons eu, au fil des ans, de nombreux problèmes d’assurances. Encore à ce jour, même si le pot est maintenant légal, son casier existe toujours, et les conséquences qui en découlent sont bien réelles. Même plus d’une décennie plus tard, nous en payons encore le prix. Littéralement. Nous payons plus cher d’assurances (habitation, auto, vie) que la moyenne des gens, car bon nombre d’assureurs ne veulent rien savoir d’assurer des « gens comme nous ». Je dis bien « nous », parce que même si je n’ai rien à voir avec sa condamnation, son casier m’affecte tout autant, par association, depuis le jour où nous sommes devenus conjoints de fait.
 
Je comprends que les gens qui consomment et qui ont pu être critiqués pour leurs habitudes par le passé sont heureux de maintenant pouvoir le faire en toute légalité. Je comprends aussi que le discours trop alarmiste qui tend à ne soulever que les points négatifs et possibles effets secondaires les irrite probablement. Mais je ne crois pas que le chemin à prendre soit de banaliser toute consommation. Il faut rester conscient que pour toute personne ayant le profil d’un potentiel dépendant, la consommation de cannabis peut devenir problématique. Tout comme la consommation d’alcool, aussi légale soit-elle. L’action de légalisation d’une substance devrait à mon avis s’accompagner de sensiblisation et de prévention, ce qui ne semble pas trop au programme présentement.
 
La dernière semaine a donné lieu à plusieurs discussions avec mon conjoint (ex-consommateur au profil dépendant, rappelons-le). En tant que parents, bien que nos enfants soient encore jeunes, nous nous questionnons sur l’approche à prendre. Comme pour tout sujet nécessitant de la sensibilisation auprès des jeunes, le choix du ton et des termes employés compte souvent pour beaucoup.

Personnellement, je sais que quand j’étais ado et que je consommais, ce n’était pas vraiment parce que j’aimais le high en soi. Je consommais principalement par convention, pour faire comme mon cercle d’ami.e.s, être dans la gang. Avec le recul, à l’âge que j’ai, j’en suis maintenant consciente. J’ai également plus confiance en moi et j’assume mon choix de ne plus consommer (alcool ou drogues), même si on m’a souvent dit que je suis plate, party pooperstuck up ou quoi que ce soit. Je m’assume assez pour refuser la pression de mes pairs (parfois très lourde), mais je sais pertinemment qu’ado, j’étais beaucoup trop insécure pour prendre ce genre de position.

C’est pourquoi je crois qu’il faut parler ouvertement et honnêtement des possibles effets négatifs aux jeunes et qu’il ne faut pas banaliser la consommation de cannabis. Qu’ils fassent leur expérience en connaissance de cause, qu’ils sachent que certaines personnes ont une sensibilité plus élevée et que personne n’a la même tolérance à la substance. Qu’il est important d’en parler si l’on sent que notre consommation devient problématique.
 
J’ai encore beaucoup d’ami.e.s dans mon entourage qui consomment, souvent pour les aider à relaxer, à mieux dormir, à calmer leur anxiété. Et si ça leur convient, good for them. Mais à l’inverse, je crois aussi que mon discours, celui de la fille qui a vu sa vie affectée de façon assez poche par l’utilisation de cannabis de quelqu’un qu’elle aime, est tout aussi valable. J’ose espérer que la légalisation ouvrira la porte à une discussion qui soit respectueuse des diverses opinions et des gens qui les émettent. Qu’elle nous permettra d’ouvrir nos oreilles (et notre coeur) aux histoires et aux réalités multiples, en laissant de côté les jugements. Un parent dont l’ado a déjà fait une psychose ne devrait pas être discrédité, tout comme un consommateur régulier ne devrait pas être dévalorisé. À chacun son histoire et son cheminement!

En tant que parents, avez-vous aussi un peu de difficulté à vous faire une tête sur l’approche à prendre pour parler de consommation de cannabis avec vos enfants?

NDLR : Ce billet a été publié de façon anonyme car malgré la légalisation de la substance, le casier judicaire de mon conjoint est toujours perçu d’un mauvais oeil dans certaines sphères (travail, famille élargie) et n’est pas socialement acceptable pour plusieurs. Afin de protéger ma famille, mes enfants surtout, l’anonymat était préférable.

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