Le divorce, ce n’était pas aussi fréquent dans les années 90 que ça l’est aujourd’hui. Oui, c’était déjà mieux vu qu’auparavant, mais c’était loin d’être la norme. Quand on faisait le tour en classe et qu’on devait parler du travail de nos parents, la plupart des élèves n’en avaient que deux à nommer. Moi, j’en avais trois, et pour moi, ça allait de soi. Même si les professeur.e.s me demandaient de dire ce que faisait mon « vrai » père. C’est quoi un vrai père, madame la professeure?
Mes parents se sont séparés avant que je commence à avoir des souvenirs. C’est peut-être mieux comme ça, parce qu’ils ne s’entendaient probablement plus très bien à la fin. Et ça ne s’est pas amélioré par la suite.
On entend beaucoup parler dernièrement des nouvelles familles recomposées, des « divorces réussis », des familles unies malgré les séparations. J’aurais aimé ça, je crois. Ça ne m’a pourtant jamais dérangée plus jeune. J’avais deux maisons, deux quartiers, deux vies. Et ces vies n’avaient pas besoin de se côtoyer ou de s’entendre.
En fait, je ne me souviens pas de la dernière fois où j’ai vu mes parents se parler. Au téléphone, parfois, si nécessaire, lorsqu’on était plus jeunes. En vrai? Pas souvent, en tout cas.
Mais j’ai grandi comme ça, et ça ne me dérangeait pas. C’était mon quotidien.
Aujourd’hui, je me dis que bien des choses auraient pu être différentes. Qu’ils auraient pu garder un semblant de relation, la politesse de se dire bonjour de loin du moins. Et si je me mariais, qu’adviendrait-il? C’est en partie à cause de ça que je ne me marierai jamais.
Maintenant que j’ai un enfant, je me fais la promesse que si un jour, mon conjoint et moi décidons de nous séparer, je ferai tout mon possible pour que mon enfant ne soit pas un enfant du divorce, mais plutôt un enfant à la magnifique famille recomposée.