Je me sens en compétition avec Pinterest quand je fais les lunchs de mes enfants…
Marie-Eve BoulianeC’était notre 2e rentrée scolaire.
Je les ai vues les photos de vos enfants contents (ou pas) devant leur casier, debout cordés dans les marches du balcon, qui montent dans l’autobus et qui font « tata » à la caméra. Ils étaient tous et toutes beaux et belles! Avec leur nouvel habit et leur nouvelle robe.
J’ai les ai tous vus passer les articles, les idées, les trucs, les lifehackers pour les mois à venir. Les plus beaux sacs d’école. Les meilleurs autocollants à apposer sur toute. Ceux avec des dinosaures, des crèmes glacées, des robots, des Peace and Love, des planètes, des ballerines pis des têtes de mort. J’ai aussi vu les plus beaux kits de « cuillères zé fourchettes » pour mettre dans la plus belle boîte à lunch et toutes les idées-bons-plans-solutions-trucs-secrets des plus beaux lunchs dans les plus belles boîtes à lunch, Les lunchs. Les sacro-saints lunchs.
Ils doivent être plus santé que jamais. Encore plus faits maison. Plus colorés. Plus diversifiés. Et sans déchets, évidemment.
Cuisiner, c’est mon travail. Je cuisine toute la journée pour des équipes de 20-30-40 personnes. Je suis passée maître dans l’art de faire beaucoup avec peu. Il faut aussi que ce soit beau et bon sans compter les intolérances, les allergies, les diètes spéciales ou les petits caprices. Mais j’aime cuisiner! J’aime faire plaisir par le bedon et c’est moi qui gère la cuisine à la maison.
Il m’était donc tout naturel et logique, quand est venu le temps de faire les fameux lunchs quotidiens de mon garçon, d’y mettre tout mon coeur et ma motivation! Malgré les contraintes imposées par l’école.
C’est ce que j’ai fait toute l’année, à chaque lunch. Mon garçon avait tous les jours un repas préparé par moi. De la barre granola au dessert. Yogourts maison. Brownie à la betterave, au tofu, aux haricots. Biscuits à la courgette, aux carottes. Muffins, scones sucrés, scones salés. Soupes à toute. Salades décomposées funky. Trempette crémeuse à l’avocat, aux pois chiches, aux patates douces. Pâtes aux pois verts-menthe-feta, brocoli-soya grillé-pesto. Chili végé, végé-pâté, creton végé. Craquelins aux grains et herbes. Bref, j’y ai mis beaucoup de temps et d’énergie.
Au quotidien, ce sont toutes des choses que je fais véritablement par plaisir, pour découvrir et m’amuser. Mais, s’est sournoisement installé le sentiment du devoir alimentaire responsable provenant d’ailleurs. Je me suis mise à avoir l’impression qu’on me disait que tout l’amour que je porte à mon enfant passait par la confection de ses lunchs.
Ainsi, je me suis mis beaucoup de pression. Vraiment trop. Je voulais tellement que ce soit selon mes normes et mes goûts pis en plus, Pinterest. Je me faisais un devoir de pas faire le même truc plus de deux fois et les sandwiches étaient pratiquement prohibées.
Crédit : Giphy
Je sais, ça frise la folie. C’est complètement absurde. Complètement disjonctée je vous dis! Surtout que je ne suis pas du genre à me faire dire quoi faire et que je me fiche pas mal de ce que les autres pensent. D’autant plus que dans le fond, mon garçon, lui, il s’en foutait pas mal d’avoir une croquette de quinoa pour dîner. Il m’a même demandé d’avoir le traiteur de l’école parfois ou du pouding au chocolat comme ses amis. #Outch
Je me suis alors souvenue de ceux qui avaient des lunchs weirds au secondaire : ils essayaient toujours de les échanger. En vain.
Heureusement, les temps ont bien changé et les lunchs weirds deviennent de plus en plus normaux. La plupart des parents cuisinent très bien et font de véritables efforts pour bien manger et inculquer à leurs enfants de bonnes habitudes alimentaires et c’est très bien.
Or, entre la beurrée de ketchup trois fois par semaine et les arancinis au chèvre-saumon-aneth, il y a place à la nuance et à la modération.
C’était notre 2e rentrée scolaire.
J’ai pris la décision de me calmer le pompon cette année. Je vais continuer de préparer les lunchs avec autant d’amour et de bons soins, mais je serai peut-être plus lousse sur les Ficellos, pis même sur les sandwiches au jambon. J’ai aussi décidé de lui commander du traiteur à l’occasion pour alléger les moments plus intenses. Pis, c’est vraiment pas grave. Parce que je serai plus zen et lui plus content d’ouvrir sa boîte à lunch!