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La journée type d’une éducatrice en Centre jeunesse : une sortie à la pataugeoire
Crédit: jbsinger/Pixabay

Lorsque je vais dans des soupers, nombreuses sont les personnes à me questionner sur les détails de mon emploi d’éducatrice en Centre Jeunesse. Les questions ou commentaires des gens démontrent à quel point mon travail ainsi que mon rôle n’est pas clair pour eux. Je n’aime pas trop lire des textes trop informatifs donc je n’en produirai pas un ici, par conséquent. Ce que je m’engage à faire, c’est plutôt vous décrire sous forme d’anecdotes des facettes de mon quotidien au travail, et ce à travers une série de textes. Voici donc le premier.

Aller à la pataugeoire avec les enfants de la DPJ

Ça se passe comment un shift de 13 h à 22 h, un samedi, à la DPJ?

D’abord, je regarde la météo, je m’informe la veille de combien d’enfants seront au foyer et avec qui je travaillerai. Les plans changent si je travaille avec un collègue régulier ou si je travaille avec un.e remplaçant.e que je dois guider.

Ce samedi. nous sommes du staff régulier et il fera chaud en titi. Dans l’auto, pendant que mon copain me reconduit au travail, je tape sur Google pataugeoire quartier X. Je parcours les données une par une et m’assure qu’il n’y a pas de piscine, car avec les jeunes que nous avons ce serait la crise pour aller à la piscine et la pataugeoire prendrait le bord ainsi que la sortie par conséquent.

Il y a une règle d’or lorsqu’on est éducateur.trice auprès des jeunes enfants. Avoir un plan, l’énoncer aux enfants, s’assurer qu’ils le comprennent et surtout ne JAMAIS changer d’avis ou de version. Vous êtes faits sinon. T’sais, des petits pits qui n’ont pas eu beaucoup de stabilité, qui sont aux prises avec un problème d’opposition, une peur généralisée de la vie ou qui ont des comportements excessifs, eh ben, ils ont besoin de savoir où ils s’en vont au quart de tour. C’est sécurisant pour eux, mais aussi pour nous.

Arrivée au foyer, je nomme mon plan aux autres éducs qui d’habitude sont in pour sortir. Notre but est de donner aux enfants ce qu’ils n’ont pas eu, et comme une famille ordinaire, ça va à la pataugeoire quand il fait 38 degrés avec le facteur humidex, c’est ce qu’on fait. On prépare l’artillerie avant de leur annoncer le plan, car sinon l’excitation monte dans le tapis, les enfants font les pop-corn et le plan peut tomber à l’eau si les cocos n’arrivent pas à se calmer. On annonce et on part en prenant le soin de mentionner qui si un.e ami.e ne suit pas les consignes, un.e des éducateur.trice.s reviendra avec, c’est simple de même.

On marche, on intervient, on marche encore et on s’amuse, pour vrai.

Arrivés sur place, on les libère après leur avoir mis de la crème solaire. On a pris soin de bien rentrer leurs couches dans leurs maillots. T’sais, on protège leur orgueil même s’ils n’ont que trois ans.
Ils jouent et s’amusent comme des enfants, tout ce qu’il y a de plus normal. C’est lorsqu’ils se fâchent que ça se corse un peu, car ils crient un peu beaucoup plus fort que les autres amis. Pas de panique, on est là et on sait quoi faire. On a le goût de le dire aux autres parents qui nous regardent, l’air inquiet.

On en vient à les connaître tellement bien… Je sais qu’un se penche d’une certaine façon quand il a un numéro deux dans sa couche et qu’il faut lui dire de venir aux toilettes tout doucement dans l’oreille pour ne pas l’humilier. L’autre, quand il commence à demander aux trois secondes il est quelle heure ou quelle est la prochaine étape, c’est qu’il angoisse. Je le prends à part et lui nomme les étapes de la journée et il se calme. La phrase clé pour lui est : « Ne t’inquiète pas, fais confiance à l’adulte. » Je pourrais continuer de vous donner des exemples.

Quand il reste peu de temps, on annonce notre départ à l’avance, soit à 5, à 3 et à 1 minute du départ, puis on quitte. C’est souvent le moment le plus difficile comme pour bien des enfants. On rentre à pied et il arrive qu’on aille besoin d’en porter sur notre dos pour éviter une grève de marche en plein boulevard.

On se rend au foyer, ils sont irritables, fatigués, mais contents. Nous aussi.

On leur offre de l’eau et une collation, on les enveloppe dans leur doudou devant une petite émission et on prépare le souper. Next step.

Notre pause? Ah, j’avais oublié de le mentionner, on n’en a pas.

Pourquoi on fait tout ça? Parfois la question m’effleure l’esprit quand j’ai un enfant en crise à gérer. Mais c’est simple, on fait tout cela parce qu’on les aime. Oui, ce serait plus simple de rester au foyer et les laisser dans la cour, mais on est dévoués et on veut leur donner ce qu’ils n’ont pas eu à la pelletée, de simples moments de bonheur. Ça pèse lourd dans notre balance et j’ose espérer que ça crée une différence pour eux.

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