Dans ma famille, on se traite souvent d’extra-terrestre parce qu’on a l’impression de ne pas « fitter » dans le moule, de ne pas correspondre au modèle qu’on nous présente à la télé ou dans les magazines, celui de la cellule familiale super occupée, organisée au quart de tour, qui fonctionne comme une petite PME efficace et bien gérée. Pourtant, on n’est pas si différents, on n’a pas de troisième œil dans le front! C’est plus subtil que ça. De petites particularités, des choses aussi simples que de ne pas faire les repas à heure fixe, ne pas aller faire une méga-épicerie chaque semaine, ne pas acheter les vêtements saisonniers six mois d’avance, me font souvent sentir comme une bibitte sortie de sa soucoupe.
Je n’ai jamais aimé la routine, ça m’étouffe, me coupe l’inspiration. Je sais que les enfants en ont besoin pour grandir sainement, le sentiment de sécurité étant nécessaire à leur bon développement. C’est pour ça que je m’y suis astreint dans une certaine mesure, mais je suis consciente que comparativement à mille autres parents, je suis chaotique et en sérieux déficit d’organisation. Mes filles ne semblent pourtant ne pas trop en souffrir, puisqu’elles s’incluent dans la blague d’extra-terrestre. Mais c’est bien la preuve qu’elles perçoivent, elles aussi, la différence.
Et ça ne s’exprime pas que dans nos habitudes de vie, ça touche aussi nos goûts et nos intérêts en général. Les filles n’ont qu’à parler de la musique ou des films qu’on écoute à la maison pour se faire répondre « C’est quoi ça??? » sur un ton qui n’invite pas à la conversation. Elles se sont souvent senties jugées et ça, ce n’est pas toujours évident quand vous êtes en train de définir votre personnalité. Maintenant qu’elles sont plus vieilles, elles assument mieux, mais passent encore régulièrement pour marginales.
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Aurais-je dû leur fournir un environnement plus conventionnel, plus stable, plus en accord avec ce qu’on voit et entend partout? Sûrement pas, vive la différence! Mais parfois, de se sentir comme une E.T. parce qu’on dîne à 14 h, qu’on n’a pas de brunch de prévu le dimanche ni de cours de power yoga, ça gosse.
Sortir du cadre, même un peu, demande une force de caractère que parfois, on n’a pas. C’est facile dans ces moments-là de se taper sur la tête et de se dire qu’on devrait donc être plus ci ou ça. Puis on se rappelle de l’amie qui pleurait de culpabilité parce qu’elle faisait souper les enfants « trop tard » et on se dit basta le moule trop rigide! Un peu de souplesse svp pour alléger ces conventions contraignantes, qu’on s’impose pour quoi au juste? Pour faire comme tout le monde? Allons, on est plus fort que ça!
Sentez-vous une pression de vous conformer au modèle ambiant?