J’étais surexcitée, samedi dernier, quand je suis entrée pour la première fois dans la nouvelle librairie l’Euguélionne, espace féministe récemment ouvert au cœur du quartier Centre-Sud, à Montréal. J’ai poussé un petit « yé! » et, en guise d’accueil, les deux libraires ont éclaté de rire, partageant mon excitation. Voyant que j’étais accompagnée de ma fille, elles m’ont tout de suite indiqué la section destinée à la littérature jeunesse non-genrée. J’étais aux anges.
L’Euguélionne, librairie féministe, c’est d’abord et avant tout une librairie spécialisée en littérature des femmes et ouvrages féministes, LGBTQIA, anti-racistes et anti-coloniaux. C’est aussi un lieu de rencontre et d’échange où se tiennent différents événements, une coopérative de solidarité (pour devenir membre, c’est par ici) et, bientôt, un espace-café où feuilleter un livre tranquillement. Il y a même quelques jeux pour occuper les enfants pendant que les parents bouquinent. #EllesOntPenséÀTout
J’ai discuté avec Sandrine, une des libraires-fondatrices, qui se dédie entre autres à l’élaboration de la collection jeunesse de la librairie. Entrevue fort sympathique qui donne envie de retourner bouquiner sans attendre, et d’être de la partie ce samedi, à la lecture de contes et aux ateliers organisés dans le cadre du Grand festival d’ouverture de la libraire.
Crédit : Andréane F. Vallières
Qu’est-ce que ça fait, une libraire jeunesse féministe?
Quand on parcourt la section jeunesse d’une librairie plus généraliste, on peut avoir ce sentiment catastrophe qu’il y a beaucoup de stéréotypes dans la littérature jeunesse. Pourtant, les livres sont un bon moyen pour sensibiliser les petits au fait que tout le monde ne vit pas de la même façon, qu’il existe une diversité des modes de vie et des identités. En tant que libraire féministe, mon objectif est d’offrir un plus grand choix de lectures aux jeunes et de guider les parents qui veulent initier leurs enfants, à travers les livres, aux valeurs d’égalité, d’ouverture et de respect de la différence.
Pourquoi les livres pour enfants non-genrés sont-ils importants?
Pour sensibiliser les jeunes à la différence, mais aussi parce que ce n’est pas vrai que tous les enfants se reconnaissent dans les stéréotypes. Chaque enfant est unique, et il pourrait y avoir une histoire pour chacun d’eux! Pour les enfants hors-norme, les livres peuvent être de bons outils pour réfléchir sur leur différence et se sentir bien avec eux-mêmes. Ou encore, pour apprendre à respecter et à défendre les autres qui sont différents. Le but est d’offrir de nouveaux modèles, pour que les jeunes soient moins enclins à se laisser influencer par les représentations dominantes de la société.
Quels sont tes auteurs jeunesse préférés, tes coups de cœur du moment?
L’équipe du collectif aime beaucoup Qui aimerais-tu être? d’Arianna Papini. Rebecca voudrait être dans la peau de chacun des animaux qu’elle rencontre. Mais le chat, lui, aimerait bien être dans la peau de Rebecca, pour que sa mère vienne l’embrasser avant de dormir. Une histoire où chacun envie l’autre, où chacun est envié par l’autre, pour apprendre à s’accepter tel qu’on est.
Nous apprécions aussi Ni poupée, ni super-héros. Mon premier guide antisexiste, de Delphine Beauvois, illustrations de Claire Cantais (à partir de 5 ans). Un album qui lutte contre les stéréotypes et les clichés avec humour, dans lequel sont glissés des clins d’œil au mouvement féministe.
Boris Brindamour et la robe orange, de Christine Baldacchino, illustrations d’Isabelle Malmenant (5-8 ans) est un autre de nos coups de cœur. Boris est un garçon débordant d’imagination, qui adore porter la robe orange trouvée dans le coin de déguisements de sa classe. Il subit alors les moqueries de ses camarades. Mais son imagination deviendra peu à peu source d’admiration pour les autres enfants. Un super livre pour prendre conscience des stéréotypes, qui a reçu de nombreux prix.
Sinon, on est aussi tous très fans d’Élise Gravel!
Merci infiniment à Sandrine pour cette entrevue, et ne manquez pas le Grand festival d’ouverture de la librairie, qui commence vendredi.
Longue vie à l’Euguélionne !