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Une bouteille à la mère
Crédit: Kev Lewis/Flickr

Et si un jour j’arrêtais de t’aimer Maman?

Ça se pourrait, ça? Malgré tout ce que tu m’as donné, malgré tout ton amour, malgré tout le mien, ça se pourrait, tu penses?

Tu sais Maman, y’a des enfants qui auraient payé cher pour t’avoir comme mère. T’es pas méchante, t’es loin d’être un monstre, alors pourquoi je me plains au fond? Pourquoi nos sorties à deux me laissent-elles tout le temps souvent un goût amer dans la bouche?

Je ne sais plus quand ça a commencé tout ça. Cette lourdeur dans tes propos. Cette insistance. Ces reproches, ces regards que je perçois comme du jugement. Cette attitude enfantine quand ça ne fait pas ton affaire. Cette propension à faire à ta tête malgré mes demandes répétées. C’est pas nouveau, mais ça ne dure pas depuis toujours non plus il me semble.

Je me souviens d’une niaiserie à mon mariage. Tu gossais à propos de ma robe. Je t’ai demandé d’arrêter, je t’ai répété de lâcher le morceau. T’as pas pu, t’as jamais voulu. Tu devais absolument gagner on dirait.

C’est pire depuis que j’ai des enfants. Ou simplement y suis-je peut-être plus sensible maintenant? On ne parle plus d’un bout de tissu là. On parle de tes petits-enfants.

Mes enfants, je les élève du mieux que je peux. Je prends des décisions pour eux, en ayant en tête leur bien-être. Leur père et moi, on est en accord avec nos choix. Arrête d’insinuer que nous avons tort, au fond, ce n’est même pas de tes affaires. Tes enfants à toi, ils sont grands maintenant. Tu as fait ta job, laisse-moi faire la mienne. Tu as le droit à ton opinion, mais j’ai le droit à la mienne aussi.

Combien de fois vais-je devoir te le dire? Arrête, Maman, décroche. Apprends à te taire. Accepte que nous ne soyons pas d’accord. Accepte que j’aie peut-être raison. Doute de toi-même, des fois. La vérité absolue, je ne prétends pas la détenir. Tu ne devrais pas toi non plus.

Tu sais ce qui me fait peur Maman, encore plus que d’arrêter un jour de t’aimer? J’ai peur d’être comme toi avec ma fille. Qu’un jour sans le savoir, je la blesse tellement qu’elle songe à couper les ponts avec moi.

Aujourd’hui j’ai éclaté. Je t’ai demandé d’arrêter, sans quoi un jour par ta faute tu allais me perdre, tu allais nous perdre. Et je l’ai pensé. Pour vrai.

Je suis rendue là Maman. J’en ai marre. Marre de pleurer, marre que ça vienne me chercher à ce point. Marre d’avoir à toujours te le répéter.

Je t’aime Maman. Mais peut-être qu’un jour, toutes ces petites fissures deviendront irréparables.

Peut-être qu’un jour je cesserai de t’aimer, Maman.

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