Du plus loin que je me souvienne, je n’ai jamais été cool à l’école. Dès la maternelle, je me suis fait écœurer par les plus grands et puis par ceux de mon âge. Au début, j’étais une rejet par association, puisque mon grand frère en était déjà victime, mais ça n’a pas été long avant que des excuses soient trouvées pour rire de moi directement.
Mes taches de rousseur, mes bonnes notes, mes pantalons à snaps pas Adidas, mes runnings qui venaient de chez Pitt Chaussures et j’en passe. Je me rappelle encore le moment où ma voisine, de quelques années ma cadette, a commencé l’école. Ça n’a pris que quelques jours avant qu’elle me fasse comprendre qu’elle ne voulait pas être associée à moi et ne voulait pas que notre amitié s’ébruite. #ForeverRejet
Au secondaire, au moins, ça s’est calmé. Je n’irais pas jusqu’à dire que c’était chose du passé, c’était simplement différent. Je n’étais plus victime de moqueries de manière quotidienne, j’étais plutôt rendue invisible. Je ne compte plus les travaux d’équipes que j’ai fait seule, les fois où j’ai été la dernière choisie dans une équipe en éduc’ ou les autres qui s’invitaient à leurs partys dans ma face sans jamais m’inviter.
Les rares fois où j’avais de l’attention, je me suis vite rendu compte que c’était pour finalement se moquer de moi par la suite. T’sais, la fois où une fille « cool » ou un gars « cute » t’adresse la parole (ou viens te parler sur MSN, LOL) et que le lendemain tout le monde pouffe de rire en te regardant du coin de l’oeil. J’avais peur des compliments et de m’ouvrir aux gens.
Mes filles grandissent et l’idée de les voir arriver dans une cour d’école me fait vraiment peur. Je ne leur souhaite pas de passer par le même chemin que moi. Ce n’est pas facile pour le moral et l’estime de soi de passer toute son enfance à se faire rejeter. J’ai peur qu’elles se sentent comme des moins que rien, qu’elles ne sachent pas si ça vaut vraiment la peine de s’accrocher. Je serai toujours là derrière elles, mais lorsqu’on cherche l’acceptation de ses pairs, « juste » l’amour de ses parents, parfois ça ne suffit pas.
À la dernière journée de mon secondaire 3, mon comparse de banc d’autobus (un p’tit nouveau en ville) m’a remis une lettre « à lire seule ». Lorsqu’il a quitté l’autobus, il n’a pas osé me regarder. Il m’avait écrit pour me dire que même si nous ne nous voyions que quelques minutes par jour sans se parler, il voyait toute la tristesse que je transportais en silence. Qu’il ne comprenait pas pourquoi j’étais victime de ces comportements et que lui trouvait qu’au contraire, j’avais l’air d’être une personne le fun. Il m’a laissé son numéro, à la fin de sa lettre. Je ne l’ai jamais appelé, j’avais la chienne.
J’ai changé d’école l’année suivante. Nous ne nous sommes jamais revus. J’ai quand même gardé cette lettre précieusement, ça m’a aidé à passer au travers. Il ne le sait pas, mais il est probablement une des raisons pour lesquelles je suis encore ici. J’espère que la vie saura mettre une personne de son calibre sur le chemin de mes filles, si jamais elles en ont besoin.
Je n’ai jamais trouvé le courage de te le dire avant, merci Hans.