La place d’un père, la place d’une mère dans une famille.
La place de deux êtres chers censés s’aimer pour la vie.
Unis par leur volonté, par les sentiments en commun.
Simplement réunis, on craint rien.
Enfin c’est c’qu’on dit, mais pas toujours ce qu’on voit.
– Sniper
Je me répète tous les jours que je n’offrirai jamais la vie qu’on m’a donnée à mes enfants. Du moins, je le souhaite.
J’ai eu 2 vies. La première, 0-14 ans, heureuse, unie, remplie de contes de fées, de voyages, de découvertes et de gâteries… La deuxième, brisée, fracassée par des parents qui ne savent pas faire la part des choses, qui mêlent leurs enfants à leurs chicanes. Une adolescence avec peu d’amour.
Tous les jours, un retour de l’école à prier que ma mère soit toujours en vie… « Ouin », j’avais une mère suicidaire en manque de lucidité, qui devait appeler les organismes communautaires toutes les semaines pour nourrir ses enfants. J’avais un père alcoolique absent, qui est partie refaire sa vie, qui t’ignore, te renie en disant que tu ne mérites pas son nom de famille…
Ça fait plus de 15 ans aujourd’hui. Qu’est-il arrivé? Qui a réécrit l’histoire? Où sont passés les soupers de famille du dimanche soir, les jeux de société, les fêtes de famille et les parents modèles? Je n’en sais rien. Sérieusement, ça m’inquiète par moment. Je me dis que nous sommes peut-être tous à un brin de la folie sans le savoir.
Un modèle masculin? Un quoi? Un père? Connais pas. J’ai eu des patrons, des amis, des copains. Ma tête a développé un mécanisme de défense envers les hommes. Nous, les femmes, nous sommes capables de tout faire. Nous sommes fortes. Nous n’avons besoin de personne pour quoi que ce soit…
Sauf qu’il faut être 2 pour avoir un enfant et depuis l’arrivée de celui-ci, je suis vraiment confrontée à moi-même. Plus d’une fois, j’ai dû demander de l’aide. Je me sens envahie d’un grand vertige. Toute ma vie, toute ma deuxième vie pardon, je n’ai pas eu à en demander. Je me sens faible par moment. Faible, car je trouve mon chum meilleur pour donner un biberon, meilleur pour calmer le bébé, meilleur dans bien des choses. Je suis déçue de moi, de ne pas être capable de tout faire moi-même.
Ce sont les belles valeurs que mes parents, mais surtout mon père absent, m’ont léguées. Un sentiment d’incertitude, d’être individualiste. Je dois souvent me parler : « Je n’offrirai pas la même vie à mes enfants. » Je me le suis promis. Nous devons donc former une équipe.
Les souvenirs de ma première vie, ceux de petite princesse, sont bien loin dans ma mémoire. Ma coquille protectrice doit laisser la place à papa, car bébé a idéalement besoin de ses 2 parents. C’est difficile d’apprendre à vivre à 3. C’est difficile d’être parent. C’est mettre de l’eau dans son vin et ne pas être toujours en accord. Le hic, c’est qu’on ne parle pas d’objet ou d’argent, on parle d’un petit être humain. L’envie de s’enfuir nous prend quelques fois, pour s’occuper seulement de sa petite personne… Comme avant.
Au fond Papa, je comprends le sentiment, l’émotion que tu as vécue il y a 20 ans. Celle de vouloir te sentir libre à nouveau. Tu as toutefois laissé bien des traces dans ma vie. Tu es lâche de nous avoir abandonnés. J’ai peut-être hérité de ton désir évasif par moment, mais pas de ta lâcheté. C’est peut-être même dans mon sang, mais je ne vivrai pas cette vie. Je suis une battante.
Je ne suis certainement pas parfaite, mais tout le temps que j’ai, les minutes, les jours, les ans, je les donnerai pour eux. Je dois réapprendre à fêter la Fête des Pères avec enthousiasme. À laisser la place que mérite mon chum, tout autant que moi. Pour lui et pour notre enfant. Tout le monde y trouvera sa place et à tous les jours, j’essaye d’apprendre à accepter que nous sommes plus forts tous ensemble, en famille.
Avez-vous grandi avec l’abandon d’un de vos parents?