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Tous ces enfants morts pour lesquels nous ne nous sommes pas indignés.
Crédit: piper60/ Pixabay

À moins d’avoir été complètement déconnecté des médias sociaux et traditionnels dans la dernière semaine, vous avez tous vu passer une photo, LA photo. Un enfant. Ce petit garçon, ce Alan devenu l’emblème du mouvement de masse du peuple syrien qui tente de se réfugier dans les pays avoisinants. Le symbole de la fuite. L’ultime tentative d’échapper à un carnage digne de la Deuxième Guerre Mondiale. « L’humanité échouée ».
 
On ne peut pas être insensible face à une image comme celle-ci et tout ce qu’elle suppose. Je ne fais pas d’exception, mais pour dire vrai, j’ai un immense malaise face à cette vague de mobilisation. Non pas que les intentions ne soient pas nobles, bien au contraire, mais cette prise de conscience subite me laisse perplexe.
 
Où étaient les gens et leur indignation, lundi, avant qu’on publie cette photo? Nous sommes bien d’accord que le conflit en Syrie ne date pas d’hier, que cette situation ne constituait pas, pour nous les Occidentaux, plus qu’un simple entrefilet dans la section « monde » du journal et à peine plus qu’un dix secondes d’antenne au bulletin de 18 h.
 
Pour quelques heures ou quelques jours, cette photo sera virale. On criera à l’injustice, à l’inertie gouvernementale, à la barbarie de l’État islamique. Et puis? Plus rien. Nous avons été Charlie durant quelques semaines, qu’en reste-il? La liberté d’expression est-elle devenue la norme mondiale? Bien sûr que non. Elle aura été, tout au plus, le point de départ de manifestations monstres desquelles n’auront découlé que plusieurs textes et, malheureusement, peu d’actions concrètes.
 
La photo de cet enfant échoué est intolérable à regarder puisqu’elle nous reflète durement notre inaction collective. Elle nous montre que, durant des années, nous sommes restés et restons toujours imperméables à ces conflits qui ravagent plusieurs pays du Moyen-Orient et de l’Afrique.
 
Des enfants qui meurent comme le petit Alan, il y en a des dizaines, voire des centaines chaque jour, mais on ne veut pas les voir. « Trop dur », diront certains. Alan est mort noyé. D’autres seront violés, battus, tomberont sous les balles ou sous la torture, au nom d’une guerre, mais on ne les voit pas. Ils meurent comme ils ont vécu, dans la souffrance et l’anonymat, sans une photo pour les faire héros.
 
Ce petit garçon aura, par son histoire et sa mort symbolique, obligé les gens à se conscientiser face à une réalité atroce. Je souhaite de tout cœur que sa photo ne tombe pas dans l’oubli de la mémoire collective. Ayons le courage de faire une introspection, de nous dire que nous avons laissé tous les petits Alan et leur famille à leur sort durant trop d’années, que nous devons agir au-delà d’un simple « j’aime » sous un texte et une photo.
 
Faites en sorte que cette prise de conscience collective ne soit pas qu’un feu de paille, parce qu’il y a d’autres Alan à sauver. Nous lui devons bien ça.
 

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