Le culte de la perfection

Je sais que tu nous aimes plus que tout et que tu as toujours fait de ton mieux pour nous. C’est pour ça que je suis incapable de t’adresser ces lignes autrement que dans l’anonymat.

Avec le recul, je comprends un peu mieux d’où te vient ce culte de la perfection que tu as toujours entretenu. Tu nous as entraînés dedans, sans t’en rendre compte probablement. Je ne t’en veux plus, tu sais.

J’ai longtemps cherché à t’impressionner. Sauf que les tapes dans le dos ne sont pas venues souvent. Nos bons coups étaient seulement chose due ; les mauvais étaient sévèrement punis. Je sais qu’au fond tu étais fière de nous, mais tu ne le montrais pas souvent. Et quand on faisait des erreurs, on s’en voulait. On t’avait encore déçue.

C’était pas bon pour l’estime de soi. Encore aujourd’hui, j’ai besoin de travailler là-dessus. Ce qui me fait mal, maman, c’est que quand j’ai traversé des épreuves, je ne me suis pas toujours tournée vers toi. Je vivais l’échec. 

Aujourd’hui, je suis maman à mon tour. S’il fallait que j’apprenne plus tard que mes enfants ont préféré ne pas se confier à moi dans leurs moments difficiles, j’en aurais le souffle coupé. Je sais bien que toi aussi, ça te ferait mal de l’apprendre. 

J’ai un peu peur, maman. Je manque toujours un peu de confiance en moi et je ne veux pas que mes enfants en fassent les frais. Je leur répète souvent que je suis fière d’eux. Je veux qu’ils sachent qu’ils sont ma plus grande fierté. Mais je ne veux pas non plus tomber dans l’autre extrême. C’est pas mieux.

Tu sais, je ne suis pas tellement différente de toi finalement.​ Ce culte de la perfection, il sera toujours un peu ancré en moi. Je ne me donne pas beaucoup droit à l’erreur, mais j’essaie et j’y arrive de plus en plus. J’aimerais tellement que tu y arrives toi aussi. Si tu savais comme on est bien sans cette pression qu’on se met soi-même sur les épaules.

On pourrait alors se donner une petite tape dans le dos pour se dire qu’on fait du bon travail.