« Moi aussi, j’veux être un bébé, bon! »

Je suis en train d’observer mon fils de quatre mois. Monsieur Grosse Couche, Monsieur Bonhomme, Bébé Albert. Je suis amoureuse, je suis comblée, je suis… je suis jalouse, man. Pourquoi j’suis plus un bébé, moi?

Restez calmes, je n’ai pas l’intention de parler d’infantilisme. Pas aujourd’hui, en tout cas. Je veux simplement vous dire que je veux redevenir un bébé quelques instants. Et je ne pense pas être la seule. Si, après ma mort, on me demandait sous quelle forme je voudrais me réincarner, je choisirais de revenir en bébé. Et, étrangement, tous les humains EVER sont arrivés dans le monde sous la forme d’un bébé. Illuminati? J’penserais pas.   

En comparaison avec celle de mon bébé, ma vie suck. Grave.

• Quand Albert va faire les courses, il ride en poussette. Les belles filles m’arrêtent et se penchent sur lui pour lui dire qu’il est beau, pendant qu’il regarde leur décolleté sans aucun scrupule, tout en laissant couler un filet de bave, bien laid back dans son siège. Moi, je sue de la face en me faisant dire « Votre fils est vraiment beau, madame! » par des déesses que je torchais en cuteness il y a à peine cinq ans.
   
• Quand j’ai envie de pipi, je dois me lever, me rendre à la salle de bain, descendre mon pantalon, m’asseoir, faire pipi, m’essuyer, me relever, remonter mon pantalon, tirer la chasse d’eau, laver mes mains, les essuyer, retourner m’asseoir et sacrer parce que j’ai manqué LE jeu du gros lot de La guerre des clans. Quand Albert a envie de pipi, il fait pipi.
   
• Être potelée dans mon monde, c’est un cauchemar. Genre de cauchemar qu’on entasse dans une gaine de soutien couleur chair parce que c’est la seule couleur disponible dans ma taille de nouvelle maman qui « trouve donc que les prix sont bons chez Winners » (messieurs, je sais que je sonne vraiment sexy en ce moment, mais calmez-vous, je suis prise). Être potelé dans le monde des bébés, c’est trendy. Ton Petit Look? Ton petit bourrelet!
   
• Quand Albert fait caca, tout le monde trouve ça adorable. Moi, je fais couler l’eau pour couper le bruit, je mets du parfum pour couper l’odeur et je lis un Archie pour couper l’ennui.
   
• Quand Albert pleure, mon chum fait tout pour répondre à ses besoins. Quand moi, je pleure, il  me demande si je suis menstruée.
   
• Sur Facebook, la vidéo d’Albert qui pince mon amie en lui tirant les cheveux avant de lui vomir dessus s’intitule « Ti-coco trop mignon qui fait le ti-tannant ». Sur Facebook, la vidéo de moi qui pince mon amie en lui tirant les cheveux avant de lui vomir dessus s’intitule « La vieille drunkass pas d’classe qui sait pas boire strikes again ».
   
• Quoi qu’il fasse, Albert rend ses parents fous d’amour. Le souvenir du premier son qu’il a émis nous fait encore frissonner de bonheur aujourd’hui. Son sourire nous coupe le souffle, ses pleurs nous brisent le coeur. On apprécie ce qu’il est, on s’ennuie de ce qu’il était et on envisage avec joie ce qu’il deviendra.

Je voudrais être un bébé. Mais brièvement, très brièvement, parce que pendant ce temps, je ne mènerais pas ma fabuleuse vie de maman. Cette fabuleuse vie de maman d’Albert.