À 37 semaines et des poussières, je me retrouvais seule à la maison un matin froid de janvier avec un mal de dos. J’ai appelé la sage-femme vers 11h pour savoir si un massage était une bonne idée. Quelques minutes plus tard, je prenais un rendez-vous. Un rendez-vous auquel je ne me suis jamais rendue.
Après quelques heures, j’étais au téléphone avec l’homme: « Je pense que ça commence… mais je ne suis pas certaine. C’est tellement différent de la dernière fois, j’arrive pas à savoir si j’ai juste mal au dos ou si c’est le début. »
Après 3 heures de douces vagues, un dîner paisible avec ma fille et un lavage de plancher, je me suis rendue à l’évidence que je ne pouvais plus être seule. À peine arrivé, Papa nous a fait une soupe de courges.
Ce sera notre dernier repas à trois.
Crédit : Valerie Poulin
Janvier 2013 avait été particulièrement froid. Drôlement, ce jour-là, la température était douce, presque apaisante. Quelques coups de téléphones à notre sage-femme entrecoupaient mes contractions. Notre confiance était telle qu’on se sentait à l’aise de vivre le début qu’entre nous. À chaque coup de fil, elle insistait pour me parler. Mon rire lui confirmait que tout était sous contrôle.
Vers 19h30, la grande couchée, la sage-femme, contre nos indications, nous a informé qu’elle commençait tranquillement à se rendre à nous. « Juste au cas. » Accompagnée de son assistante, elle est arrivée quelques quarts d’heure plus tard.
« Je ne pense pas qu’on aura le temps de gonfler la piscine » a-t-elle dit. Tant pis. Une baignoire montréalaise ferait l’affaire.
Entre mes deux accouchements, j’avais lu un récit de naissance d’une femme qui n’avait pas poussé du tout. Elle avait laissé les vagues faire descendre son bébé. Recroquevillée dans mon bain, serviettes roulées sous mon cou, j’ai ressenti le besoin de pousser. J’ai décidé de lâcher prise et de laisser mon corps faire son travail.
Le sourire aux lèvres, je suis sortie du bain pour me rendre dans la chambre. J’ai croisé l’homme, on s’est embrassé tendrement et j’ai senti le bébé descendre d’un coup. Comme si son baiser avait ouvert le passage. J’ai placé mes mains pour sentir mon bébé. Le contact de mes doigts sur ma vulve a encore fait descendre le bébé. Presque une heure était passée depuis que j’avais lâché prise. Je n’avais toujours pas poussé.
Et là, tout s’est mis à aller très vite. Accroupie, à quatre pattes, sur le côté… rien ne fonctionnait. La sage-femme a alors sorti un banc d’accouchement, un genre de siège en forme de C. L’outil magique.
Dès que j’y ai déposé mes fesses, on a tenté de me montrer, à l’aide d’un miroir, mon bébé qui arrivait. Seul problème: on a omis de me dire que je n’avais pas encore perdu mes eaux. Je n’y voyais que du bleu et des membranes. J’ai perdu le nord, j’ai vu noir. Je pensais, à tort, que mon bébé était en détresse.
Trois fortes poussées et la poche a éclaté. Partout. Sur le mur, les sages femmes et le chien qui s’était pointé le bout du nez pour voir ce qui causait toute la turbulence.
Et comme ça, une petite fille est née, à 21h50, à peine une heure après l’arrivée de ces femmes si sages.
Comme avec la première, mes sentiments sont restés figés dans le temps. J’essayais de tout absorber ce qui se passait autour de moi, Papa pleurait pour nous deux.
Je me suis levée, me suis lavée et j’ai retrouvé un lit propre. On m’a habillé et j’ai allaité. Dans la pénombre, Papa, Maman, bébé et les accoucheuses discutaient de tout ce qu’ils venaient de vivre quand ils ont entrevu une petite fille à la chevelure en bataille se présenter dans le cadre de porte.
Dès qu’elle a posé son regard sur sa petite soeur, toutes les émotions sont remontées en moi. Pas un oeil de sec dans la pièce. On regardait en silence, émus.
Photo: Retardateur d’apparell photo
Et comme ça, avec le chien dans le cadre de porte, notre famille était complète.
Est-ce que votre deuxième accouchement a été, comme moi, bien différent de votre premier?