Depuis quelques années, je m’interroge beaucoup sur l’impact de mon cellulaire dans ma vie et celle de ma fille. Je suis, je dois l’admettre, assez dépendante de mon iPhone tout en le détestant profondément. Quand Ange était plus petite, c’était facile d’oublier les conséquences de son utilisation lorsque j’étais avec elle, mais avec le temps et la présence de plus en plus accrue des appareils du genre autour d’elle, elle s’y est intéressée. Je ne l’ai jamais laissée jouer avec le mien et, je le dis ouvertement, je suis indignée quand je vois de très jeunes enfants dans leur poussette ou sur un banc, un téléphone à la main, tandis que les parents jasent ou font leur épicerie sans s’en préoccuper. Je ne pense pas qu’un téléphone soit une très bonne gardienne.
– Maman, c’est plate, j’ai rien à faire, je peux jouer avec ton téléphone?
– Na.
– Mais lààààà, pourquoi toi t’as le droit et pas moi?
– Je joue pas avec mon téléphone en ce moment, c’est quoi le rapport?
– Pourquoi t’as le droit d’avoir un téléphone et que moi non? Mamie et papa me laissent jouer avec, eux!
– Je sais, sont vraiment plus cool que moi.
– Arh, maman! Je dis pas ça pour ça, mais pourquoi tu veux pas?
– Je te l’ai déjà dit plein de fois, t’as une quantité folle de choses pour t’occuper : t’as les amis dans la ruelle, des crayons, de la pâte à modeler, des trucs de bricolage à l’infini, t’as des poupées, de la vaisselle pour faire le thé ou à manger, des tonnes de livres… T’as pas besoin de mon téléphone pour te distraire. Puis, comme tu dis, tout le monde sauf moi te laisse jouer avec le leur, donc ici, tu joues à autre chose et voilà.
– C’est vraiment plate, j’suis fâchée.
– Écoute, si tu t’ennuies tant que ça, on peut jouer une partie de cartes ou faire du bricolage?
– Non.
– Ouais bah, c’est certain que si ce que tu veux c’est jouer avec mon téléphone, toutes mes propositions te tenteront pas.
– Maman, s’il te plaît… (Yeux de Bambi et paupières papillonnantes.)
– Non.
– ARH! T’ES PAS FINE!
C’était notre dernière discussion sur l’utilisation du téléphone et à quelques détails près, nous l’avons eue vraiment très souvent. Plusieurs fois, j’ai été beaucoup plus explicite dans mes réponses, en lui expliquant qu’elle devait apprendre à se servir de son imagination, qu’ailleurs elle y jouait assez, que je voulais qu’elle apprenne à s’ennuyer un peu. C’est un point qui me trouble particulièrement : comment sommes-nous censés encourager nos enfants à développer leur imagination et leur créativité si on les installe toujours devant un écran, un film ou une distraction dès qu’ils s’ennuient?
Finalement, j’ai réfléchi et j’en suis venue à la conclusion qu’Angélik avait assez d’imagination et que je pouvais m’adoucir un peu : j’inclus désormais dix minutes de jeux dans le choix d’une récompense quand elle m’aide plus que ses tâches habituelles ou que j’ai envie de la féliciter pour une belle réussite.
Aussi, progressivement, je laisse mon téléphone de côté quand nous sommes ensemble, je le laisse à la maison quand nous allons au parc, j’essaie de moins regarder mon écran et de réapprendre à m’ennuyer un peu, moi aussi.
Laissez-vous vos enfants jouer avec votre téléphone? Comment gérez-vous vos plus vieux avec l’envie de posséder un cellulaire?